[memories]
Déjà gamin, t'avais cette sale habitude de te rebeller contre l'autorité. Tu tenais tête à ton père, à tes profs, tu te ramassais des heures des colles. Ça te valait les acclamations du public, mais aussi la haine du paternel. Pas que tu voulais te faire remarquer, t'en avais rien à faire d'être une sorte de star dans ton lycée. Mais t'aimais ça, de faire entendre ta voix. Avoir ton mot à dire, être quelqu'un. La relation avec ton père s'est clairement jamais améliorée, et t'as senti petit à petit le mépris qu'il avait pour toi et tes rêves trop grands. Il te voyait avocat, médecin, tu te voyais musicien ou artiste de rue. Puis ça a éclaté entre vous deux et comme ta mère a rien fait, tu t'es cassé. T'avais dix-neuf ans, rien pour toi, à part quelques fringues et ton paquet de clopes adoré. T'as trouvé ton bled, un petit appart qui te convient, auquel tu t'es vite attaché parce que c'était ta porte vers la liberté. Et t'aimais ça bordel, d'être libre. Voler de tes propres ailes, pouvoir être qui tu veux, faire ce que tu veux. T'as commencé à vivre au jour le jour, à enchaîner les petits boulots pour te payer ta bouffe, tes cigarettes, et autres complaisances. T'as jamais été un ange, mais t'es pas non plus un démon. Un entre-deux, un gars qui l'ouvre quand il veut, qui a pas peur, qui regarde la vie droit dans les yeux. Tu sors, tu bois, mais tu perds jamais le contrôle. T'as un minimum de maturité qui résonne ton esprit impulsif, mais qui s'inhibe quand tes poings te supplient de prendre la relève. T'aime pas qu'on t'emmerde, et tu le fais vite comprendre. Puis à tes vingt ans, t'es tombé sur elle. Marley, âme errante d'une gamine paumée, âme semblable à la tienne.

Bonnie and Clyde, l'insupportable et l'insupporté. Tu l'as croisée y a quatre ans, un soir où vous étiez torchés, et tu t'es dit que plus jamais tu la reverrais. Gamine égarée dans la rue, dans un bar, titubante. Vous avez décuvés ensemble et bordel ce que vous avez ri, ce soir-là. Vous étiez deux corps sur la chaussée, face au monde, aux étoiles. Elle a squatté ton canapé et l'a plus jamais quitté. Elle vient souvient chez toi, elle toque plus, et même si parfois elle te tape sur le système, sa présence a presque fini par te rassurer. C'est une mini-toi, aussi rebelle, aussi chiante, mais tu sais qu'elle est pas méchante. Tu t'amuses à l'emmerder et elle te le rend bien. Tu te fous de ses relations bateaux, elle se moque de tiennes, imite tes conquêtes en prenant une voix geignarde. Vous critiquez les autres à deux, parfois gamins immatures. Vous divaguez sur des sujets philosophiques quand vous êtes défoncés, parfois adultes ouverts d'esprit. Mais vous vous dites jamais quand ça va pas, même si tu le sais parce que Marley, tu la connais casi par coeur. C'est Netflix and chill un soir sur deux, avec gueule de bois entre les deux. Sans elle, tu te dis que tu te ferais sûrement chier. Tu te souviens même plus de quand tu la connaissais pas, c'est comme si elle avait été toujours là pour détraquer ta santé mentale. Tu sais même pas comment tu peux la supporter à certains moments, puis y en a d'autres où t'as juste trop de mal à la voir s'en aller. Marley et toi, c'est même pas le chat et la souris. C'est juste deux chats, deux matous qui se supportent parfois, qui se bagarrent, sauf qu'à elle jamais tu lui ferais de mal. Tu t'en voudrais toute ta vie.