I.

« Fais rentrer ta sœur. » « Elle peut se rentrer toute seule. » Une claque lui mordille la base de la nuque, comme s’il s’était courbé sous le pressentiment ou que sa mère l’avait frôlé à dessein. Les phalanges se plaquent sous la peau et Elijah dresse deux pupilles troubles et craintives. « Pardon, maman. » Parfois, il trouve injuste de se plier à l’ordre matriarcal et tout-puissant qui règne dans le 407, SE Warsaw Street et d’aller courir après Dinah parce que cette petite conne ne sait pas lire l’heure – ou qu’elle s’en fout. Puis il dévisage sa mère, sa fatigue, jusqu’à sa lassitude, et il redevient le fils poli, gentil et serviable qu’elle a élevé. Ce n’est que pour elle qu’Elijah repousse ce qu’il fait sur la table et qu’il se traîne jusqu’au perron de leur maison en papier. Il y a longtemps qu’aucun Young ne regarde plus dans quoi ils vivent. Et, lui, il n’a même d’yeux que pour l’autre côté de la rue. « Elles savent pas que t’existes. » Pendant qu’il scrutait machinalement à travers les rideaux, Dinah s’est plantée en bas des marches. Elle le regarde faire avec un sourire en coin, et une cigarette coincée là. « Éteins ça avant qu’elle te voie. » C’est de ça que serait mort leur père. Ou c’est la déformation professionnelle d’une infirmière. Ni le frère ni la sœur ne le demande jamais. « N’empêche, j’ai raison, fait Dinah en écrasant le mégot sous sa semelle. » « Ta gueule et rentre. » Pour faire bonne mesure, et toute mesure d’éducation, l’aîné gifle l’oreille de la cadette d’une pichenette.

II.

Il n’y a qu’une seule règle. Et si pas qu’une, alors c’est la première et la plus importante de toutes : quand le flic qui pointe un flingue sur toi est blanc et que tu es noir, tu ne cours pas. Jamais. Elijah ne sait pas quand c’est devenu une autorisation pour la police de Liberty. En revanche, il sait que Lance s’apprête à faire une connerie. « Couche-toi sur le sol ! » C’est la seconde injonction du policier et son collègue en profite pour resserrer sa poigne autour du col d’Elijah. Ce dernier ne résiste pas, même pas un peu. Quand il l’a fait mettre à genoux, il s’en est éclaté les rotules sur le bitume. Quand il le pousse vers le sol, il s’allonge, menton le premier. Ne cours pas, jamais. Mais Lance hésite. Il jette un œil au coffre de la voiture, plein de CD piratés parce qu’on est en 97 et que tout le monde veut écouter I'll Be Missing You de Puff Daddy sans lui reverser les dollars qu'on n'a déjà pas pour la cantine des mômes ou faire les courses des parents. « Je t'ai dit de t'coucher sur le sol ! » « Fais ce qu'il dit, putain ! » Un peu ramassé sur ses coudes, Elijah finit de gueuler que le flic lui écrase la mâchoire sur l'asphalte. Il doit croire qu'il va s'enfuir ou, pire, se jeter sur l'arme. Parce qu'il n'y a qu'une seule règle... Et personne n'a dû la mettre dans le crâne de ce con de Lance, dont les semelles chuintent sur le trottoir tandis qu'il vire d'angle et s'élance direction... quoi ? il pense atteindre la ruelle ? et ces CD, ils valent vraiment le coup de fuir ? Et la balle, est-ce qu'ils valaient la balle qui lui explose un omoplate en entrant et la pointe du coeur en sortant ?

III.

La pogne d’Elijah se referme sur la main, qui roule immédiatement en poing. « Tu ferais mieux d’enlever tes doigts, fils de pute Young ! » Il n’écoute pas. Elijah n’écoute pas beaucoup, et surtout pas les filles, sauf une : « Laisse ma mère hors de ça. » Nettement plus fort, il attire Ava contre lui. L’adolescente se débat – mollement quand on la connaît. Et l’étreinte se dessert tout de suite. Plus elle est près, plus il est lâche. « J’l’ai pas touchée, cette nana. » « Qui a dit que t’avais fait ça ? » Paumes à plat, elle frappe franchement le torse et éloigne le gaillard avec. « Alors, c’est quoi ? » Il aimerait se prêter à la dispute, Elijah, ça se voit qu’il y  met toutes ses forces mais son rictus vire ironique, à la fois blasé et amusé. « Et tu te fous de ma gueule, en plus ? gueule la Baker en renouvelant ses salutations aux pectoraux. » Pour la forme, l’adolescent expulse tout l’oxygène dans ses poumons avant de lui menotter les poignets. « Y’a toujours quelque chose avec toi… » « Tu peux partir ! » « Tu veux que je parte ? » Les pupilles tirent sur le sombre, l’opposé de la colère. « Peut-être. » Son manque de conviction grossit le sourire d’Elijah. « Tu voudrais pas te foutre en colère, juste une fois ? Je saurais que t’es humain. » Ava penche assez vers lui pour le frôler à la bouche. « Et si je veux te garder ou non. »

IV.

Dinah pianote sur le bord de la table. Ses ongles couleur lilas agacent le plastique tandis que sa mère lui jette une oeillade mi soucieuse mi impatiente. « Tu crois que ça le fera venir plus vite ? » Elle sait bien que non. Elle voudrait qu'il entre, tout de suite, pour déverser la rage qui macère depuis le matin dans son ventre. Les dix minutes qui suivent et la livre de patates épluchées n'aident nullement. Alors : « Putain, t'étais où ? » « Langage. » Sous l'invective maternelle, Dinah se renfrogne mais n'en perd pas sa colère de vue. « Tu devais conduire maman à l'hôpital. » « Je sais. » Elijah se laisse lourdement tomber sur une chaise. Il est plein de sueur et de poussière, et des éclaboussures carmin bordent le col et les coutures de son t-shirt. Sa sœur en attrape une entre ses ongles et tire sèchement dessus. « Lâche-moi un peu, Dee. » La paume le dégage de la prison d'os et de chair. Dinah paraît s'y brûler. « J'ai fait un travail. » « Un travail ? » On entend distinctement qu'elle sait quel genre de choses l'a occupé et que la qualification ne sied pas très bien. « Ouais, il repartit. Et ça a duré plus longtemps que prévu. Désolé, 'man. » La femme au-dessus des deux casseroles hausse les épaules, l'air de ne pas vouloir encombrer. « Je vais te reprendre rendez-vous. » « Et dans combien de temps ? » « Fais pas chier, Dee ! Je m'en occupe. » La chaise racle le carrelage de la cuisine et Elijah sort d'un coup. Il heurte le cadre à l'épaule, peste et s'enfuit plus vite encore. Comme sa cadette, il n'aime pas faire ce qu'il fait, mais comment peut-il emmener sa mère passer des examens à l'hôpital s'il n'a pas les moyens de payer les frais... ? Maintenant, il peut.

V.

« Ça y est, lâche Ava en se hissant sur le ventre d’Elijah. » Ses doigts s’amusent de la sueur au-dessus du nombril. « Je me suis décidée. » « À propos de quoi ? » « De te reprendre. » Voilà sept ou huit mois qu’ils ont recommencé à coucher ensemble. Parce qu’elle est là, qu’elle s’occupe souvent de Wes et qu’il y a toujours ce quelque chose entre eux… C’est plus sérieux et plus formel, soudain, bien qu’il tente de paraître dégagé, à la limite de l’insouciance. « Alors, ça donne quoi ? J’ai été bon ? » Le ton grivois est récompensé d’un pincement sous les côtes. « Pas mauvais, juge Ava, impériale et moqueuse. Mais à une condition. » D’un mouvement du bassin, Elijah la renverse parmi les draps saccagés. Ses lèvres frôlent la bordure de la mâchoire tandis que son regard dit qu’il écoute. « Je veux que t’appelles l’école. » « Encore ? » Comme il est de plus en plus occupé dans les affaires des Black Foxes, et qu’il tient à donner l’illusion – pour Wes et pour Wes seulement – qu’il a un métier respectable en jouant les brancardiers à l’hôpital, Ava va de plus en plus fréquemment chercher le gamin à l’école. C’est chaque fois le même cirque : elle s’appelle bien Baker mais ce n’est pas la mère de Wes. « Je m’en occupe plus souvent qu’elle… » La voix prend de l’aigreur et Elijah se redresse d’instinct sur les coudes. « Je peux pas la virer, il objecte. C’est sa mère… » « Ça, je le sais, suinte une intervention copieusement ignorée. » « ...et elle va parfois le chercher. » À deux paumes, Ava l’aide franchement à se dégager de leur étreinte et il bougonne, un peu, que ça ne finisse jamais différemment. « Je veux pas sa place, Eli. Je veux juste arrêter d’être… (On dirait qu’elle s’emploie à imiter le quidam, avec une voix si calme et détachée que ça ne lui ressemble pas.) Pas Nora, l’autre Baker. »

ce que j'ai pensé de ta fiche: c'est un grand oui pour moi le scéna, l'avatar, tout. je te valide avec grand plaisir

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Ouais, nous on fout une nounou d'enfer, et plutôt deux fois qu'une Quoi qu'il en soit, on te souhaite officiellement bienvenue sur le forum bébé ! On espère que tu t'y plairas et que tu kifferas ton aventure avec nous

Maintenant que tu fais partie de la bande, tu peux recenser ton métier, poster un scénario ou des pré-liens et bien entendu, te chercher des liens en postant ta fiche

Pour finir, n'oublie pas de faire un tour dans le flood et dans les jeux

Amuse-toi bien sur litw