Journée épuisante. Partagée entre les cours de danse et un service entier ce soir. Simplement parce que celle censée assurer n’a pas été fichue de se pointer à l’heure dite. Alors te voilà, la bonne poire de service, au téléphone avec ta mère en prenant la direction du restaurant, après avoir quitté ton studio de danse. Toi censée passer la soirée à réviser quelques pas pour ta prochaine vidéo. Mais la vie t’a bel et bien appris une chose, rien n’est juste. Rien n’est équitable. Le fair play n’existe pas. C’est donc dans un soupir épuisé que tu récupères ta voiture pour enfin rentrer chez toi. Un morceau de Rihanna résonnant dans l’habitacle alors que tu en fredonnes les paroles que tu connais par cœur. La lune est déjà haute dans le ciel, brisant la nuit de sa clarté, alors que tu te gares enfin en bas de chez toi. Tu tâches de faire doucement, ne pas réveiller ton frère. Traverser le salon avec ton téléphone en guise de lampe torche après avoir accroché ton blouson au porte manteaux.
C’est dans la salle de bains que tu t’échoues, prenant une douche rapide et brulante. Tu fermes les yeux sous l’eau, tu apprécies cette brève joie du quotidien, si futile mais si agréable. Pendant un instant, tu en oublies tous les tracas, toutes les emmerdes. Tu détends tes muscles endoloris et vide complètement ton esprit. Debout devant le miroir, quelques instants plus tard tu évites de trop t’observer, trop longtemps. Tu n’aimes pas celle que tu es devenu, la plupart du temps. Tu préfères éviter de faire face à celle que tu es. Des rêves partiellement brisés, une carrière insatisfaisante. Un manque cruel d’épanouissement. Des plaisirs trop brefs, trop arrachés à un quotidien insipide. C’est idiot mais tu le sens, dans le fond, que derrière cette espèce de bonne humeur qui souvent te caractérise en public, tu es bien loin de la bulle de bonheur en laquelle tu as voulu croire, enfant et rêveuse.

Finalement, tu enfiles un sous vêtement et un débardeur, avant de te diriger dans la chambre, toujours avec ton téléphone dont tu éteins la lampe torche, profitant de quelques minutes assises au bord du lit pour passer flâner sur les réseaux sociaux et lires quelques messages. À tes côtés, Em semble dormir, paisiblement, après une journée surement trop longue et trop éprouvante. Vous n’avez clairement pas fait les choix de carrière les plus faciles et les moins fatiguant. Finalement, tu poses ton téléphone sur la table de chevet avant de venir t’allonger. Ton corps se rapproche de celui de ton petit ami, ta tête venant un instant se caler contre son torse, alors qu’il dort sur le dos. Ta main caresse sa peau alors que tu décides de remonter un peu plus, venant embrasser chaque parcelle de sa peau, jusqu’à son cou, puis son oreille à laquelle tu murmures doucement « Tu m’as manqué… » Comme une confession nocturne, volée à un instant silencieux. Mais tu es forcé d’admettre qu’Emerson est la meilleure chose qui te sois arrivé. Malgré le chaotique de votre histoire. Vos disputes et vos caractères explosifs. Sans lui, tu ne sais pas où tu en serais aujourd’hui. Tu ne sais pas si tu aurais réussi à surmonter toutes les épreuves de ta vie. Continué d’avancer, où si tu aurais simplement tout plaqué, tout fuis, lâchement.
Il commence à s’agiter, sous tes attentions brulantes, parce que tu ne l’as pas assez vu, depuis quelques jours. Des rythmes de vie trop intenses, qui font que souvent, vous ne faites que vous croiser. Mais tu as besoin de te raccrocher à lui, ton ancre pour ne pas dériver. Alors doucement, tu viens t’asseoir à califourchon sur lui, tandis que tu embrasses encore son cou, avant de remonter jusqu’à son visage, que tu saisi doucement entre tes mains pour l’embrasser tendrement. « J’en ai marre de ne faire que te croiser… » Murmures-tu de nouveau, avant de venir doucement caler ton front contre son cou. Là blottis contre lui, tu pourrais y rester. Rêver, fuir ta vie et ses déboires. T’abandonner.