sleepwalker

feat. clyde & orion

Dans le silence de la nuit, un garçon marchait dans la rue, une ruelle plus précisément. Encore une nuit, où Orion ne dormait pas. Non, il était en train de marcher dans la rue. Le teint blafard. Il se privait de sommeil pour éviter les terreurs nocturnes. Il se privait d'être proche d'Astra pour ne pas qu'elle voit sa décadence. Orion sombrait. Il ne savait pas s'il sombrait dans la folie ou dans le côté obscur, ce côté sombre de lui même qu'il ne connaissait pas. Il n'avait que sa veste en cuir sur lui, et son arme de service dans la poche. Il la gardait toujours avec lui, c'était sa manière à lui de se rassurer même si à chaque fois dans ses cauchemars, c'était lui même qui se tirait dessus.

L'endroit était loin d'être rassurant, pour lui. Et la nuit noire ne l'aidait pas dans sa crise de panique qui commençait. Quelle idée. La ruelle lui rappelait ce qu'il avait vu des années plus tôt. Orion se tendit au maximum et il avait l'impression qu'il allait mourir étouffé. Il s'appuya contre le mur et sa crise augmenta. Maintenant son cauchemar prenait vie. Avec beaucoup de difficulté, il prit son arme et il tenta de la pointer devant lui. Mais il n'arrivait pas à tendre son bras. On aurait dit qu'il voulait pointer son arme sur lui. Mais il ne voulait pas. Il n'était pas à ce point là.

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MACFLY

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La soirée s'était plutôt bien déroulée, il avait profité, dealé, et personne n'avait trouvé à y redire, parce que le personnel de l'Insomnia n'était pas regardant. C'était une situation agréable au fond, de pouvoir faire ce qu'on voulait, de glisser quelques billets dans son portefeuille comme si c'était sa tune à lui, et non pas celle soutirée contre quelques gramme de paradis artificiel dans l'espoir de baiser le ciel durant quelques secondes de trop. Il quittait à présent la boîte, laissant ses pas s'immobiliser sur le trottoir, tandis qu'il tirait une clope de son paquet, avant de l'allumer d'un geste automatique. Trop habituel, un jour, ça finirait par avoir sa peau, tout comme cette ville finirait par le détruire à resserrer ses chaines comme les cuisses d'une femme autour de sa taille. Il aurait pu ficher le camp, se créer une autre vie ailleurs, mais il était revenu, comme si Liberty était et resterait sa maîtresse la plus exigeante, et à laquelle il ne pouvait rien refuser. Il avait retrouvé son petit frère pour qui il avait fait trois ans de taule. Il avait retrouvé les RD comme s'il ne les avait jamais quitté. Il avait retrouvé Blake, ce meilleur ami choisi par un autre, mais qui ne le restait que parce que lui le voulait bien. Il avait même recroisé Babe, la sulfureuse et colérique petite brune dont il connaissait chaque millimètre de sa peau par cœur et les tatouages qui y étaient gravés. Elle le détestait autant qu'il la souillait un peu plus à chaque fois.

Pourtant, il ne pensait à aucun d'entre eux, lorsqu'il emprunta la ruelle à côté de l'Insomnia. Celle qui allait lui permettre de récupérer sa précieuse moto et d'aller trainer ailleurs. Sauf qu'il remarqua ce type, les yeux attirés comme deux aimants sur le corps angoissé, l'arme à sa main qu'un reflet d'un lampadaire rendit plus présente que le reste. Il avait vu la pâleur de ses traits, l'anxiété de ses doigts, il serait capable de lui tirer dessus s'il comprenait qu'il était là. Mais c'était comme si l'inconnu ne savait pas si c'était contre le reste du monde ou lui-même qu'il voulait tirer. Clyde n'hésita pas, s'il aurait pu tirer son arme, il se rapprocha silencieusement, rapidement, à la manière d'un félin trop habile, d'un prédateur trop précis, saisissant le poignet armé qu'il tordit brutalement pour lui faire lâcher prise, le canon braqué vers l'extérieur. « Hey déconne pas ! » Des mots chargés de la fumée de la clope tombée au sol dans l'opération. Pas de remord. Jamais. Il était contre lui, il avait presque l'impression de revoir la panique de son cadet cinq ans plus tôt, raison pour laquelle il déclara : « Il n'y a rien. Personne. Tout va bien. » A part lui. Dans une ruelle trop sombre pour que l'imagination ne s'affole pas. Mais Clyde avait toujours été trop terre à terre pour croire au croquemitaine et autres conneries. Si l'ombre était un excellent refuge, elle permettait aussi d'agir sans être vu, cape parfaite pour les sales affaires d'un type comme lui.

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La situation était critique, Orion semblait confondre réalité et cauchemar. Il vivait dans un monde autre. Il avait envie d'hurler, il avait envie de se donner des coups pour se réveiller et se dire que ce n'était qu'un mauvais rêve. Il avait envie de voir Astra à ses côtés pour tenter de le rassurer comme elle le faisait toujours. Mais non, Orion était dans cette ruelle et il avait l'impression que ses démons l'envahissaient. Et s'il était arrivé au bout? Et s'il avait juste compté les quelques minutes qui lui restait avant de rejoindre les ténèbres pour toujours?

Orion était encore vraiment tendu, sa crise ne faisait qu'empirer. Jamais avant il n'avait fait de tel crise. Jamais il n'avait été autant paniqué. Orion avait l'impression qu'il devenait fou. Le jeune garçon avait la vue qui se brouillait. Pourtant au loin, il entendait une voix. Une voix qui le ramenait à la réalité. La ruelle se dessina et un homme plus âgé que lui était auprès de lui. Orion glissa son regard vers l'homme et il ne dit pas un mot. Aucun mot ne pouvait sortir de sa bouche. Il s'était revu dix ans plus tôt, lorsqu'il avait vu ce meurtre. Mais il y avait une grande différence, aujourd'hui, il ne se passait rien et il avait eu une arme dans sa main. Ses muscles se détendaient enfin, il pouvait bouger. Honteux, il fixa au loin et il murmura:

"Je suis désolé..."

Il ne savait pas s'il parlait pour lui, s'il parlait pour une Astra qui n'était pas là, ou pour l'homme qui l'avait empêché de faire n'importe quoi, mais Orion recouvrait petit à petit la raison. Il avait encore honte. Mais il allait se maîtriser.

"J'ai...j'ai cru voir quelque..chose.."

Les mots lui revenaient mais il avait menti. Il n'avait rien vu mais il voulait pas que l'homme le juge fou. Peut être qu'il l'était, il ne le savait pas. Mais c'était de pire en pire.  

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MACFLY

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Le regard de l'inconnu trouva celui de Clyde, finalement, comme s'il était revenu à la réalité, découvrait pour la première fois qu'il n'était pas seul, et pas forcément en danger. La panique refluait à la manière d'un raz de marée qui aurait fini de faire ses ravages. Clyde, lui, restait immobile, scrutant les traits de celui qui semblait un peu trop pâle, presque malade et nauséeux face à quelque chose qui n'était pas là. Il le sentit se détendre sous ses doigts, ses muscles se relâcher, et son regard partir au loin, comme pour éviter celui scrutateur du rouquin. Il s'excusa, mais il n'avait rien fait. Clyde ne lui en avait pas laissé le temps, ni contre soi-même, ni contre lui-même. Puis il reprit encore, expliqua qu'il avait cru voir quelque chose dans la ruelle. Rien d'étonnant, ceux qui avaient trop d'imagination pouvaient s'inventer des monstres tapis dans l'ombre. Parfois ce n'était pas que des chimères. Parfois, c'était des monstres faits de chair et d'os dont les lèvres affamées scrutaient les imprudents. Un rire moqueur se sauva des lèvres du tatoué qui le fixait toujours, mais se détacha lentement, mettant un terme à la brutalité de sa prise contre ce corps de gosse. Pas si gamin pourtant, de ce regard qui clame avoir vu plus de choses qu'un autre de son âge. Ce ne serait ni le premier, ni le dernier, Clyde en était le meilleur exemple.

« Et tu sors un flingue, juste comme ça ? Prêt à tuer le chat de la vieille Hoberwood ? » qu'il cracha à la ruelle, d'un sourire en coin, tandis qu'il se tenait à quelques pas de celui dont il ignorait encore le nom. Pas que ça le chagrine ou le préoccupe, pas plus que l'absence du chat en question. Il n'avait pas besoin de savoir comment s'appelait toutes les personnes qui croisaient sa route, mais Liberty semblait le vouloir, assommer son crâne de plusieurs vérités. Il lui disait quelque chose pourtant, comme un visage déjà croisé par le passé, mais plus jeune, différent. Les années avaient trop bien fait leur boulot, il ne parvenait pas à le remettre. Tant pis. Il haussa les épaules tout en ajoutant : « Tu sais, si tu sais pas t'en servir, tu devrais t'abstenir de jouer avec de vraies balles. Ça peut être dangereux. » Ce côté protecteur qui semble suinter de chaque parcelle de sa chair, tatouée ou non. Mais l'inconnu n'était personne justement. Ni un Red. Ni son cadet. Ni Blake. Ni... Un gros dur, un bad boy prêt à en découdre à casser des dents, qui pourtant s'avérait plus sociable et secourable que la moitié des flics de la ville. Le monde, à Liberty, ne tournait vraiment pas rond. Quant aux flics, il avait du mal avec eux, tout comme avec les matons. Mauvaise expérience. A part quelques exceptions qui lui mangeaient dans la main par des accords quelconques. Mais c'était tout. Alors s'il avait su la vérité sur le gamin, pas sûr qu'il serait intervenu. Là, malgré tout, il porta une cigarette à ses lèvres, l'y coinçant, avant de tendre son paquet au gamin encore tremblant. « Clope ? » De l'autre main, il alluma la tige à goudron, inspirant une taffe... qu'il laissa s'échapper alors qu'il retenait sa clope entre ses dents.

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Orion était redevenu lui même et il n'avait même pas pensé à remercier l'homme en face de lui. S'il n'était pas intervenu, Orion aurait mis à exécution son cauchemar qui lui dictait ses moindres faits et gestes. Peut être qu'il se serait fait du mal sans le vouloir. Orion frissonna. Il ne voulait pas se faire du mal parce que malgré tout, il aimait la vie. Il aimait des gens qui allait l'aider à surmonter tout ça et tourner définitivement la page du passé. Le jeune Carrow regarda l'homme qui l'avait enfin lâché. Il avait honte. Honte de lui, honte de ce qu'il était. Honte que l'homme ait pu le voir dans une situation où il était si vulnérable et fragile.

"On me poursuit... J'ai cru que c'était lui qui me voulait du mal..." marmonna le jeune policier, légèrement agacé de se prendre une leçon de moral même involontaire. Et il lui continuait sur la leçon de moral. " Je sais m'en servir, je vais tous les jours au stand de tir...." Orion s'énervait, doucement, on ne le remarquerait peut être pas. Seule sa tête et son air de zombie pourrait faire peur. Orion soupira et il reprit: " Cette rue est dangereuse et à ce que je sache, il est encore possible de se promener avec une arme tant qu'on le permis de port d'arme... " . Il ne voulait pas dire qu'il était policier, ne sachant pas sur qui il pouvait tomber. Soudain, il lui proposa une cigarette qu'Orion déclina. Ce n'était pas le moment de tomber dans le tabac alors qu'il n'avait pas dormi de plusieurs jours.  Orion croisa les bras et il ramassa son arme, qu'il rangea avant de dire:

"Merci quand même de m'avoir aidé à ne pas sombrer dans le cauchemar vivant... J'ai juste paniqué... " 

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MACFLY

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On le poursuivait ? Clyde haussa un sourcil, se tendant légèrement, plus aux aguets qu'il ne l'avait été jusque-là. Se retrouver sur la route d'un autre, ça pouvait facilement se produire, et en même temps, difficile d'imaginer une vraie raison pour qu'on le poursuive. Il le fixa, attentivement, cherchant derrière sa pâleur le genre de personne qui pouvait se trouver à ses trousses. Un léger sourire amusé apparut sur ses lèvres en l'entendant affirmer qu'il savait se servir de son arme et qu'il s'entraînait. Peut-être, mais le sang froid n'était pas là, et c'était ce qu'il fallait pour appuyer sur la détente, viser juste et bien. Clyde n'avait jamais tué personne, mais se battre, il savait le faire. Les sports de combat avaient été un excellent complément pour apprendre à gérer ses émotions. Enfin... la colère, c'était plutôt moyen, mais il s'en servait pour attaquer, comme moteur, et non pas gouverné par elle. Bien évidemment, il y avait des exceptions, l'alcool par exemple, n'aidait sûrement pas. Il se défendait encore, justifiait la présence de son arme... tout comme Clyde pouvait affirmer être en droit d'avoir la sienne pour la même raison. Ce qui serait différent s'il se faisait condamner un jour pour un crime plus grave. Enfin, sa première condamnation n'avait pas été jugée comme un "crime" à proprement parlé, mais comme une infraction. Merci l'Orégon. « J'suis pas flic, c'est bon. Je vais pas te demander ton permis de port d'armes. Je comprends le besoin d'assurer ses arrières. » lâcha-t-il en éloignant sa clope de ses lèvres. Il était un Red Devils, et tous ceux du gang n'avaient pas de permis. Et puis, on avait beau dire ce qu'on voulait, parfois, la loi était trop conne pour comprendre que la vie n'est pas un long fleuve tranquille, plus encore pour certains.

L'inconnu avait refusé d'en prendre une, et cela ne fit ni chaud, ni froid à Clyde qui se contenta de ranger son paquet. « Dangereuse ? » demanda-t-il, les lèvres totalement étirées en un sourire amusé. « Bah... si tu cherches pas d'emmerdes, y a pas de raison que t'en aies. » Réponse d'un motard qui savait pertinemment qu'il faisait parti de ceux que l'on craignait, justement, dans cette ruelle. « Mais pas d'quoi. » Il tira une autre taffe, petit plaisir nocturne. « T'as fait quoi pour qu'on te poursuive ? » demanda-t-il ensuite, comme s'il parlait avec un vieux copain de la pluie et du beau temps. Conversation presque trop naturelle aux lèvres du tatoué qui s'appuya au mur dans une attitude nonchalante. Mais cette nouvelle position lui permettait de voir, et l'inconnu, et la ruelle. Il était chez lui, sur son domaine, il n'y avait pas moyen qu'on le surprenne.

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Le jeune policier se sentait rassuré, enfin du moins en apparence. Il se posait tellement de questions sur tout. Mais aucun danger à l'horizon. Rien. Il préféra se concentrer sur l'homme, le détailler du regard. Il n'était pas moche à regarder. Il avait ce côté rassurant qu'Orion attendait pour le protéger de ce fou furieux. Il soupira, entendant la réflexion de son sauveur et un petit sourire amusé s'afficha sur son visage. S'il savait qu'Orion était flic.

Orion regarda autour de lui, pas une trace d'une ombre le suivant. Il avait encore imaginé qu'on le suivait. Il devenait fou et parano. Orion se sentit d'une grande détresse morale à ce moment précis. Il sombrait dans la folie petit à petit. C'était vicieux. Orion eut froid tout d'un coup, il frissonna. Il garda une main sur son arme, comme si ça le rassurait. L'homme lui parlait, lui expliquant que cette rue n'était dangereux que si on cherchait les ennuis. Le jeune Carrow se mit à pâlir de nouveau. Il prit son visage entre ses mains pour essayer de se calmer.

"Je ne cherche pas les ennuis, généralement ce sont eux qui me trouvent... "

Orion avait les mots qui se coinçaient dans la gorge. Il inspira doucement pour se calmer et d'une voix absente, il répondit:

"J'étais là au mauvais endroit et au mauvais moment... et je paye ça... "

Je suis prêt à mourir... pensa-t-il dans sa tête. Les mots raisonnaient dans son esprit. Il était perdu. Définitivement.  

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MACFLY