Paris —Athénaïs. Ah si vous saviez comme on voulait tous se la faire. Elle est pas restée bien longtemps par chez nous, mais comme elle était belle. Elle respire sa région natale. On l'associait aux matins d'été, à l'ombre, et aux oranges. Elle sentait la fleur d'orangers, et quand on lui demandait, elle répondait avec une nonchalance terrible, que c'était sa mère qui lui faisait son parfum. On ne savait pas où était la Toscane avant qu'elle ne mette les pieds à Paris. Ou, alors on savait bien que c'était en Italie, mais on n'y avait jamais mis les pieds. Elle était née là bas, et avait grandit là bas. On savait tout ça parce qu'on avait les hormones en feu, et que chacun d'entre nous dans cette classe de vingt quatre élèves de lycée privé, on voulait tous savoir ce qui se cachait derrière les robes d'été d'Athénaïs. Et puis, qu'est ce qu'on aimait prononcer son prénom, vous n'avez pas idée. On avait toujours l'impression d'avoir un secret aux bords des lèvres. Notre professeur de géographie, lui avait fait la remarque qu'elle portait le même prénom d'une des favorite du Roi. Ah, c'était notre favorite. Ça on ne pouvait pas le nier. Et puis un jour elle est partie. On a appris plus tard que c'était à cause de son père. Un sacré type selon les rumeurs.

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Florence —Athénaïs Catoni ? C'est la fille de Raphaël Marais, et de la petite Catoni non ? Oh le père Catoni était fou à l'idée de voir sa fille, son unique fille, partir avec un voyou de la sorte. Il lui avait promis la lune, et au final, tout ce qu'il avait fait c'était engrosser la princesse. C'est une sacré histoire qu'on raconte encore. Le père de la petite Athénaïs était un trafiquant de pierres précieuses, le genre de métier assez immoral, qui ferme les yeux sur la provenance des diamants, si vous voyez ce que je veux dire. Mais il était français, il était charmant, alors la petite Catoni, elle a pas mis longtemps à lui céder. Et puis, elle cherchait de l'aventure, à vingt ans, on a toujours envie d'aventure, vous savez. Ils se sont mariés, il était sérieux au sujet de Josepha, sauf qu'il avait des démons.. vénal, ambitieux, opportuniste, égoïste.. Alors que Josepha, c'était le soleil de Toscane avec un talent fou pour les parfums, un nez extraordinaire. Athénaïs est née entourée de passion, sauf que la passion, ça fait pas un mariage.. Et puis quand Raphaël Marais s'est fait arrêter pour recel, et meurtre. Les deux sont rentrées en Italie, Athénaïs devait avoir quoi.. quinze ans ?

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Naples —Comment ça je sais pas de quoi je parle ? Josepha est morte de chagrin. Je suis son frère, je connais ma soeur non ? C'est cet imbécile qui a tué ma soeur. Je l'ai obligée à changer le nom de ma nièce. L'idée qu'elle porte le même nom que cet incapable m'était absolument insupportable. Josepha c'était le soleil, elle représentait la demoiselle italienne, celle qui porte des robes légères qui se soulève légèrement à la première brise, celle qui sourit au marché avec des fleurs dans le creux du bras. Josepha.. elle méritait mieux que ça, elle est morte.. quoi .. deux ans après leur retour. Athénaïs était restée de marbre, c'était étrange d'ailleurs, pas un sourire, pas une larme. De la colère je crois.. Je pense qu'elle cachait sa colère. Pas contre son père, mais plutôt contre sa mère, étrangement.. Je suppose qu'à dix sept ans on perds un peu la tête... et qu'on en veut à la terre entière. C'est ses grands parents qui se sont occupé d'elle. C'était pas son connard de père qui allait subvenir aux besoins de l'adolescente, jusqu'à ce qu'elle déménage à Rome pour faire ses études.

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Rome— Un scandale, je vous dis. Athénaïs Catoni était l'archétype de la franco-italienne. Parce qu'elle était italienne par la chaleur de sa peau, le jais de ses cheveux, les yeux en amandes et l'italien qui passait ses lèvres. Mais française car bornée, têtue, nonchalante, insouciante par certains aspects, et quand elle était énervée, elle crachait des insanités en français. Elle est arrivée dans ma promotion d'université, tous frais payés, aux frais de son grand père, un patron d'entreprise de parfum de luxe me semble t-il. Et les étudiantes la détestait, les étudiants, eux, la vénérait, peut être pas tous, mais la vaste majorité. Toujours entourée de belles choses, et de belles personnes, elle rayonnait. Je me souviendrais toujours de cette image absolument érotique, qui doit encore hanter un bon nombre de rêve chaud. Elle, souriante, et ivre, avec un verre de proscco dans la main, il faisait chaud, elle souriait, et il faisait chaud, on pouvait apercevoir le bout de son sein par le décolleté de son chemisier blanc. Athénaïs c'était beaucoup de franchise, et en même temps beaucoup de mystère. Parfois, elle regardait au loin en buvant, comme si elle cachait un secret. Et tous ceux qui était présent ce soir là, avait envie de le connaître ce fameux secret.

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Paradis artificiels— Cette jeune femme avait le diable au creux des jambes, et l'insolence aux bords des lèvres. Elle était la lune, au contraire de sa mère. Elle aimait la nuit, elle aimait le jour, mais elle était elle même quand ont tirait les rideaux. Elle travaillait pour une entreprise de pharmaceutique londonienne, appréciée par ses collègues, adorée par ses collègues masculins. Une malédiction par certain moment, plus les années passent, et plus cette attention incessante lui pèse. Mais elle ne se plaint pas, elle ne se plaint jamais cette situation. Se plaindre de la beauté, dieu quelle prétentieux, quelle ingratitude. Alors plutôt que de se renfermer, elle est devenue cette espèce de fantasme, confiante. Sa connaissance des plantes lui permettait de mettre la main sur les meilleurs idées pour monter aux paradis. Opium, champignons, plantes hallucinogènes, elle pouvait tout nous faire découvrir. Elle rirait, comme elle riait .. je me souviens de son rire comme le tintement des carillons qui dansent au vent. Et quand son grand père est décédé quelques mois avec sa grand mère, elle a touché le gros lot. Pas de larmes, pas de sourires. En apprenant à la connaître, elle disait que c'était dans les moment de grande tristesse qu'elle réussissait à être le plus inexpressive. Elle pouvait tout quitter et arrêter de travailler pour cette entreprise qu'elle méprisait au final. Alors elle est partie, elle a laissé un vide dans ma tête et dans mon coeur. Celle qui s'est échappée, comme ils disent.. Elle disait qu'elle était orpheline, alors qu'elle avait tout de même un père, toujours en prison, mais plus pour très longtemps. Je me demande ce qu'elle est devenue.. 

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Paris —Ma fille ? J'ai reçu une lettre oui. Je sors de prison dans quelques mois. Elle me pardonnait disait-elle. J'en doute. S'il y a bien une chose dont je suis certain qu'elle a hérité c'était le côté rancunier propre aux Catoni. J'ai fait des erreurs dans ma vie, mais pas ma fille. Je sais qu'elle a renié mon nom, et choisit celui de sa mère. Elle vit aux Etats Unis depuis quelques semaines, qu'elle a ouvert une herboristerie, elle est bien comme sa mère sur ce coup là, entourée de plantes. Elle m'envoie cette lettre pour me dire de ne jamais la contacter, ce qui prouve bien qu'elle ne m'a rien pardonné du tout. Je pense qu'elle avait besoin d'un prétexte pour m'envoyer cette lettre, pour sa conscience peut être. Pour sa .. conscience surement. Je me souviens d'elle rêveuse, je pense que les choses ont changées. Sa lettre est plutôt froide, dans un français formel. Athénaïs .. c'était le prénom de mon arrière grand mère. Je ne sais pas pourquoi j'avais invité pour qu'elle s'appelle comme ça. Surement à cause de cette vieille photographie qui traînait dans ma maison d'enfance au bord de la mer..

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Oregon —Qu'est ce que je fais à Liberty, moi qui grandit dans les plus grandes capitales européennes, qui est née en Toscane, qui a grandit à Paris, qui a appris à Rome, qui a travaillée à Londres ? Parce que les rumeurs, il y a toujours quelqu'un pour parler de cette ville qui dans un coin du monde vit par ses propres règles. Quand je ferme les yeux, je vois les paysages de Toscane, j'entends les bruissements des feuilles sur la place principale de la ville natale de ma mère, mais il y a plus loin que ça, il y a l'ombre des nuits parisiennes, la pénombre des rues de Florence, et l'obscurité des rues de Londres. Pourquoi ici me demandez vous ? Et pourquoi pas ? Ici, je peux être l'herboriste, celle qui aide l'homme à s'endormir, et la femme à planer. Pourquoi ici ? Et pourquoi pas ?