.small hands
Il froisse avec ses pattes d’ours ton contrôle. Ton sourire fière s’efface quand il lâche un soupir. Les yeux cherchant un endroit où se raccrocher, tu fixes dubitatif la boule de papier qui contient une de tes meilleurs notes. À l’école, t’es le premier de la classe et c’est censé être une bonne chose. « On s’en fout des notes » qu’il babille, les veines gorgées de mauvaises bières de chantier. Quelques cadavres se trouvaient sous tes yeux, ornant la table comme d’éternels piliers. Alors tu te dis qu’il sera content demain, mais que pour l’instant il a juste eu une mauvaise journée. Tu ne dis rien et tu ranges les cannettes pour que ta maman n’ait pas à le faire le lendemain. Il se masse les tempes, mal de crâne sans doute dû au trop de boisson. Tu lui poses un verre d’eau sur la table basse, et il bégaye un « merci, Aaron ». Tu sais au fond qu’il est fière de toi, t’as pas besoin de chercher la bagarre ce soir. Tu la chercheras plus tard, quand l’âge montant tu réaliseras que ce n’est pas ton rôle de t’occuper du géniteur mais l’inverse. En attendant, tu récupères silencieusement ta note et tu vas te coucher dans le lit du haut des deux superposés. Ta sœur dormais comme une pierre et tu avais peur de la réveiller.

.if i'm to die
Ce que tu portes c’est un de ses vieux costumes. Parce que t’avais pas de noir classieux pour lui dire adieu. Debout devant un cercueil présentant un mort maquillé pour paraître encore vivant, y a de quoi verser des larmes à cette impression de retour à la vie. T’as presque l’impression qu’il pourrait faire comme d’habitude, ouvrir le coffre massif renfermant son corps et demander ce que c’est que ce bordel. Mais il a rien fait et c’est ta mère qui a parlé, pas tout à fait en larme parce que leur amour était épuisé depuis quelques années. Seulement assez pour que sa voix soit coupée d’inspiration demandant à ses émotions de se contrôler. Ton père pouvait être un connard, mais il pouvait aussi être un homme bien. Ta sœur est aux toilettes, sa pudeur l’empêche de pleurer en publique. T’aurais préférer en vouloir à quelqu’un pour sa mort, mais y a personne à l’origine de tout ça. L’accident cardiovasculaire est arrivé sans que vous vous en doutiez. Ta sœur était là, c’est notamment pour ça qu’elle pleure autant.
Vous sortez en grande pompe de l’église, tu crois même pas en dieu. Un homme viens te voir, il te disait vaguement quelque chose. Il te propose de reprendre le boulot de ton père, que c’est bien payé et que ça évitera d’hériter de trop de dettes. D’abord tu envoies bouler le gentleman, t’as autre chose à faire. Il te donne sa carte que tu prends pour mieux te débarrasser de lui, et tu continues de suivre le corbillard. Tu te mords les lèvres, tu sais pas ce que tu vas faire. T’as tout juste dix-huit ans, pas d’argent et paumé.

.my heart is gold and my hands are cold
Un clips, un crépitement, une bouffée. Les vapeurs toxiques enivrantes de la nicotine emplissent tes poumons, le filtre blond entre les lippes. Il fait nuit, on voit bien le petit bout braiser de la cigarette tout juste allumée. Tu la retires avec deux doigts, t’as l’air nonchalant pendant qu’un gars en veston cuir te cause de choses dont tu n’as que faire. Tu ne caches pas ton ennuie et ça l’énerve, il rougit de colère alors qu’il était déjà rose du froid mordant de la nuit. Tu souris d’insolence, toi tu devais simplement récupérer un paquet qu’il n’avait pas. Homme à tout faire chez les Lynch, c’est faire le ménage dans tout les sens du terme, t'étais homme de main au sens strict du terme. Tu te fous des motards aux ronronnements criards, toi tu veux la protection qu’ils t’ont promis quand t’as pris l’ancien job du paternel à sa mort. Héritage de violence, tu étais pourtant promis à tellement mieux. « tu me donnes mal à la tête » dis-tu en tirant encore une fois sur ta cigarette. Il grogne l’animal, tant et si bien que tu te manges son poing droit en pleine face. Le choc fut violent, t’as entendu un craquèlement quand le poing c’est écrasé sur ton cartilage. Ta main vient par réflexe tenir ton nez, la douleur est vive, tu grimaces. Tu sens un liquide arriver sur tes doigts. Tu relèves la tête vers le fautif, il te regarde avec satisfaction, comme s’il avait gagné. Comme si tu allais le laisser gagner. Tu envoies ton pieds frapper ses genoux sur le coté, croché du vile serpent. C’est un bruit sourd qui s’en suit, la chute plus violente que prévu l’a fait tomber dans les pommes. Tu lâches ton nez en souffrance, tu tires une nouvelle fois, grimaces, jette la cigarette encore à moitié utilisable. Fallait que tu nettoies tout ça.