Un soupire. Encore un. Il les compte plus, Eliott. Il les enchaîne. Pourtant, il fut un temps où son travail ne le faisait pas soupirer. Il s'y rendait alors avec enthousiasme. Il se sentait utile, avait l'impression d'aider la ville. Maintenant, il est rien d'autre qu'un connard de plus. Un pourri, un bon à rien. Il essaye de faire les choses correctement. Mais quelque chose vient toujours lui rappeler ce qu'il a fait – ce qu'il continue de faire. Alors il se braque – il renonce. Foutu cercle vicieux. Tous ses efforts sont de toute façon concentrés sur son couple. Stella mérite au moins ça. Elle mérite qu'il fasse de son mieux, qu'il arrange les choses. Elle semble voir ses efforts. Et même si elle n'est toujours pas rentrée, elle accepte qu'ils se voient, qu'ils fassent à nouveau connaissance après tous ces mois passés loin l'un de l'autre. C'est un début. Eliott s'en contente. Il est patient, même si parfois, il a envie de tout envoyer promener. Ce serait plus simple pour tout le monde si il était plus là. Si il se barrait dans une autre ville. Ça serait difficile pour lui d'être loin de Stella, son ame. Être loin de Liberty, qu'il a connu toute sa vie. Mais il est prêt à le faire si ça veut dire que sa femme est plus heureuse, loin de lui. Loin de sa présence toxique qui abîme tout ce qu'il touche. Mais il le fera pas, pas tant qu'elle l'aura pas définitivement chassé de sa vie. Ce qui ne saurait tarder – c'est pas comme si il allait effacer cette histoire de corruption après tout, c'est qu'une question de temps avant que Stella ne découvre tout.
Mais il continuera à s'accrocher. Il continuera tant qu'il aura l'impression que sauver son mariage est possible. Peut-être que tout allait s'arranger. Peut-être qu'ils allaient sortir de cette crise grandis, plus forts. Leur amour est plus fort que ça, plus fort que tout. Puis finalement, c'est normal de passer par là. Tous les couples connaissent des crises. Le policier n'a pas à aller loin dans son entourage pour trouver un exemple ; Rhys et Faye. Ce qu'ils traversent n'est pas évident et pourtant, ils ne lâchent pas l'affaire, jamais. Eliott, il les admire pour ça. Il trouve ça beau, il trouve ça fort.
D'ailleurs, il doit voir Faye dans quelques instants. Une fois sa journée terminée, il se change, enfile un tee-shirt et un jean propre. Il ajuste sa veste et part, prêt à rejoindre son amie – celle de sa femme, aussi. Ils ont rendez-vous dans un bar. Eliott passe le plus de temps possible loin de chez lui. C'est pas vraiment chez lui, de toute façon, sans la présence éblouissante de sa femme. C'est rien qu'une vulgaire maison froide et vide où il ne se sent pas à sa place. Quand il arrive au bar, Faye est déjà là. Il la repère au loin, installée à une table, et va à sa rencontre, un sourire aux lèvres. Ça fait un moment qu'ils ne se sont pas vus – même si ils sont proches, Eliott passe quand même bien plus de temps avec Rhys qu'avec Faye. C'est Rhys qui lui a confié ses doutes, ses craintes même. Celles de voir l'être aimé partir, abandonner face à une situation bien trop compliquée. Malgré les mots rassurants, Eliott lui avait dit qu'il allait se renseigner, pour voir ce qu'il en était du côté de la brune. Par la même occasion, il allait pouvoir voir comment elle allait, comment elle vivait les choses. Enfin il arrive à sa hauteur, la salue avec une accolade amicale. « T'es là depuis longtemps ? » Il s'installe face à elle et commande une bière. « Je te dirais bien que je suis content de te voir mais.. Je voudrais pas mentir. » qu'il lance en haussant les épaules. La chercher, la faire tourner en bourrique, voilà sa marque de fabrique. Au fond, il est plus que ravi de la voir – elle saura lui changer les idées, il en est persuadé.