luz, elle est toujours perdue. luz, elle sait jamais vraiment comment réagir, quoi faire. alors souvent, luz, elle laisse parler son instinct. c’est ce qu’il s’est produit y’a peu de temps, quand elle s’est rendue au cinéma et a rencontré cet homme.
œillades échangées, murmures dévergondés, les langues qui se délient pour finalement se rencontrer. corps unis le temps d’une unique nuitée, union célébrée par les étoiles rougissantes et la lune avenante.
ça fait quelques jours maintenant, quelques semaines peut-être même. luz, elle perd la notion du temps. elle a pas oublié pourtant. parce que luz, elle s’donne pas facilement. elle se déshabille devant l’œillet voyeuriste de la webcam mais elle s’embrase rarement dans des bras, des vrais. c’est pour ça qu’le soir, quand elle est recroquevillée dans le lit, elle serre son coussin fort contre elle. parce qu’elle aime bien les câlins, qu’elle a besoin d’être entourée et aimée.
y’a que cash, d’habitude, qu’elle accueille entre ses reins, entre ses cuisses. mais cette nuit-là, elle s’est laissée aller, elle a fait preuve de beaucoup de spontanéité. sauf qu’elle regrette pas. elle s’demande qui c’est, s’ils se reverront, sans forcément beaucoup l’espérer. c’est juste de la curiosité… parce que d’une certaine façon, elle trouve ça excitant de s’être liée aussi intimement à un inconnu.
et ce soir, luz, elle ressent encore le besoin de s’évader, d’aller ailleurs. le premier lieu qu’elle trouve, c’est cet établissement aux néons grillés et rosés, où des filles sont poussées à se déshabiller contre de l’argent. au fond, elle est pas si différente d’elles, luz. alors la curiosité (encore) la pousse à avancer.
elle se sent pourtant pas trop à sa place. y’a que des hommes qui laissent leurs sales pattes traîner sur les courbes voluptueuses des femmes. y’a quelques femmes qui se dandinent, que luz regarde un instant pour observer la façon de faire. et si luz elle aime bien les femmes aussi, ça la met plus mal à l’aise qu’autre chose. alors elle va s’attabler au bar, commande un verre de whisky (même si elle aime pas ça, pour goûter).
« Bonsoir. »
elle relève les sourcils, surprise. la voix lui dit quelque chose… et quand il s’assoit, elle comprend. elle laisse ses opales sombres passer sur le minois qu’elle a aimé pendant quelques heures. elle laisse ses mirettes s’amouracher de ses lèvres, de ses yeux, l’écoute commander un truc dont elle ignore le goût. luz, elle a envie de goûter, juste parce qu’elle sait pas c’que c’est.
« Que faites-vous dans un endroit pareil ? »
elle hausse les épaules, sourit légèrement, presque avec nostalgie.
« bonsoir. »
elle ronronne. c’est drôle de se recroiser, c’est drôle de le voir dans un autre contexte… de le voir réellement, éclairé par une lumière et pas complètement caché dans une salle de cinéma. pourtant, elle a eu l’occasion de le regarder vraiment, luz, quand elle l’a embrassé. quand elle a découvert sa sensibilité contre ses doigts, qu’elle s’est cambrée pour l’aduler.
« je me… documente. »
elle rit doucement, fait rouler le whisky dans son verre pour le porter à ses lèvres… et grimacer après être parvenue à avaler.
« wah, ça brûle ! »
elle peut pas s’empêcher d’exprimer. elle s’y attendait tellement pas luz, elle a des larmes aux yeux.
« je suis juste très curieuse, en fait… donc j’ai vu de la lumière et je suis entrée. »
elle avoue, un peu honteuse. et puis elle réfléchit un peu, se pose la même question. elle pensait pas luz qu’il était du genre à fréquenter ce genre d’endroit. heureusement qu’ils se sont protégés…
« et j’imagine que vous n’êtes pas venu ici pour papoter avec moi. »
elle sous-entend que cet homme qu’elle a embrasé y’a quelques jours de ça, il est venu pour regarder. pour toucher. et luz, elle peut pas s’empêcher d’être un peu déçue. même si ce ne sont que des inconnus, luz, elle aime bien imaginer des choses. et elle l’imaginait certainement pas comme ça. pourtant, c’est qui luz pour lui reprocher ? alors qu’elle-même, elle enlève ses vêtements contre un peu de monnaie.