Elle avait délicatement coupé la fleur avant de la piquer avec sa fourchette. Un haussement de sourcils indiquait à son géniteur un signe de quelque indifférence. « Que vont-ils devenir selon toi ? » La question resta en léger suspens puis une réponse chuchotée se fit entendre quelques instants plus tard. « Sûrement des barbares. » Son attention se porta à présent vers le livre posé sur le coin de la table vieillie. Le titre la fit rire et lui apporta un sourire tandis que les informations sinistres défilaient à la télévision. « Ma princesse doit apprendre ses cours cet après-midi. » Un changement brusque de sujet. Les éléments présents dans son assiette finirent par tous être mangés, et elle la plaça dans le lave-vaisselle. En embrassant ses parents, la couronne se fit attraper par ses fines mains et se mit sur sa tête. « Ne jamais oublier les règles. » Les murs étaient blancs, parfois ornés de tableaux et un en particulier, de dessins de la chinoise. Souvent, elle redécouvrait la décoration qui, à la fois orientale et française, était vieillotte. Sa chambre, de taille moyenne, optait pour la même ambiance que celle des autres pièces. Et ses peluches, confortablement installées sur son lit, semblaient lui demander de leur montrer ses connaissances. Elle se mit à lire les syntagmes du précieux livre et à les recopier sur une feuille où elle en appris quelques-uns avant de regarder par la fenêtre. Un oiseau se posant sur le rebord, aussi beau était-il, possédait un pelage monotone. En lui soufflant doucement dessus, la poussière partit et heureux fut le jeune volatile. Apprendre, apprendre, apprendre. Elle revint venir informer tardivement ses parents qui, assis à table, se regardaient mutuellement et en silence. Des explications se firent demander suite à cette ambiance morose, mais on lui répondit avec une autre phrase, mystérieuse. « Il est arrivé la même chose ce mois-ci. » La chinoise ne comprenait pas immédiatement cette annonce soudaine, et observa le téléphone à cadran posé. Deux assassinats se produisaient chez les Kuan depuis leur arrivée aux États-Unis lui répondit son père, et un autre ce mois-ci. « Bonjour tristesse. » fut ses dernières paroles avant de retourner dans sa chambre.

Elle enleva les derniers lambeaux de papier avec ses ongles jaunis avant de se regarder à nouveau dans le miroir ovale cassé. Son visage était presque recouvert de sang et ses cheveux étaient mouillés ; son maquillage avait coulé. La pièce semblait être détruite, les cadres explosés se trouvant par terre et les quelques bibelots qui étaient là se trouvaient maintenant dénués de leur intérêt premier. Avec le lavabo encore utilisable, elle se lava les ongles et chercha une serviette pour se nettoyer le visage. Elle se regarda une nouvelle fois. Mésange frappa le miroir avec son poing qui se cassa encore plus. ☆ Quinze minutes plus tard, elle tâtonnait la couverture à son réveil. La respiration haletante et les pensées mélangées, elle essaya de se rendormir sans réellement de succès. Ce fut naturel pour elle de décider de lire ses précédents récits qui, dans des situations cocasses comme celle-ci, aidaient à calmer sa chère personne. Avançant vers sa commode, elle observa les tiroirs. Ses histoires étaient soigneusement rangées. Les pochettes déchirées lui servaient de cachette pour les plus secrètes. Quelques instants après, entre ses mains, se trouva une feuille de papier où elle observa les lettres - ou plutôt les mots entiers - écrites dessus, quittant ensuite le cocon familial. Mésange fait tourner un dé entre ses doigts. La femme grotesque aux bulldogs précédemment rencontrée la regarde et lui lance sauvagement un juron. Il tombe sur le six. Malheureux, malheureux, malheureux. Elle inscrit le résultat au crayon de papier sur une feuille et la remet dans son sac à dos. Certaines silhouettes expriment leurs pensées à voix haute. Nous sommes de ceux qui luttent. Comme ces rayons de soleil qui luttent contre les nuages ? Ils ne viendront améliorer la luminosité que bien des heures plus tard. Une tasse se brise en morceaux ; murmures à travers les murs. Surprise, surprise, surprise. Qui pourrait bien lui parler ? Elle observe finalement un bas de corps. Les chaussures portées sont élégantes.