[a lot on my mind]
tu es une femme forte, josephine. du moins, tu t'en persuade et tu refuses de penser le contraire : tu ne laisseras personne te marcher dessus comme avant. ○ tu détestes ton travail. probablement parce qu'il consiste à alimenter des sauvages en alcool, et surtout parce que tu te sens comme un objet, et tu as strictement horreur de ça. pourtant, tu y restes. ○ tu n'aimes pas, tu n'aimes plus. les seules fois où tu te l'es permis, ton corps et ton coeur ont souffert à dose égale. maintenant, tu n'aimes pas : tu possèdes, ou tu détruis. ○ tu te joues des hommes. tu les méprise, tu les déteste. tu les traite comme ils t'ont traitée. ○ tu te sens toi-même uniquement lorsque la nuit tombe. les étoiles te mettent en confiance et la lune te guide. ○ ton corps est marqué par les coups. tu t'obstines à les cacher, encore aujourd'hui, parce que tu les sens te frapper avec la même force qu'avant. comme si la peur était toujours là, sous ta peau. ○ d'habitude très distante, tu es d'une tendresse sans égal avec les gens que tu portes dans ton coeur. évidemment, tu les trie et les choisis, pour éviter les erreurs. autrement, tu ne t'ouvres jamais. ○ tu as une sorte d'addiction au café, c'est ce qui te permets de trouver un peu de lumière. ○ il t'arrive d'être hantée par le passé, de jour comme de nuit. tu luttes encore. ○ les cigarettes que tu consommes excessivement te font penser que tu vas mieux. ○ tu es perdue, josephine. mais tu refuses de l'admettre.

   
   ça recommence. c'est brûlant, ça te frappe le visage et tu ne peux rien faire. tu te sens coincée, prise au piège, sans être capable de t'enfuir. ton corps entier hurle au secours, mais rien ni personne ne l'entend. tu ne l'entend  pas. tu n'en as pas la force. tu ne peux pas parler ni entendre. tu peux juste saigner. pleurer. et attendre que ça passe.
tu peux rien faire, alors tu te persuades que le problème viens de toi. tu n'aimes pas les bonnes personnes, tu ne sais pas tomber amoureuse comme les autres. ton coeur est défectueux, il te fais trembler et toute tes émotions sont réduites. tu n'es pas comme il faut. c'est de ta faute si on te frappe, c'est de ta faute si tu les énerve, c'est tout.
non, c'est faux.
c'est faux.
c'est de leur faute à eux.
c'est eux qui sont défectueux.
c'est eux, qui sont détraqués.
alors que tes couleurs s'éteignent une à une, et se font lentement remplacer par un filtre noir et blanc aussi épais que ta tristesse,
tout devient froid.
le sang qui coulent dans tes veines et qui tâche le sol devient de la pierre, ton corps et attiré au sol et ne peut s'en détacher. la douleur est telle qu'au final, tu ne la ressens plus. tu ne ressens plus rien. le vide grandit, s'étale, engloutit ce que tu es. tes cinq sens semblent avoir disparu, tu es lâchée dans le néant, ne percevant que ton souffle accéléré et douloureux. c'est comme si tu flottais dans l'espace, seule, ne sentant même pas le poids de ton corps. tu aimerais être dans l'espace, rejoindre les étoiles, ou juste disparaître. t'éteindre. t'évaporer.
alors tu fermes les yeux.
tu veux dormir. fuir. longtemps.
tu veux rêver de choses merveilleuses, tu veux recommencer à zéro, tu veux faire comme si ça n'était pas la deuxième fois que tu subissais de violences telles que celle-ci.
que ton être est épuisé. que ta tristesse est grande.
et quand tu ouvres péniblement les yeux quelques heures plus tard,
le vide est toujours là.