With Jack Daniel on my breath

feat. clyde & nova

Ça faisait bizarre. De voir le ciel sans barreau. De respirer simplement. De boire jusqu'à plus soif. De déconner à nouveau avec de vieux potes. De marcher simplement dans la rue. De plus avoir besoin de menacer pour survivre entre quatre murs. De plus avoir à rendre de services contre d'autres services comme un truc viscéral qui vous tord les tripes. Ça faisait bizarre d'être à l'air libre, tout simplement. Il était sorti ce matin, libéré après trois ans à avoir la sensation de vivre une vie que personne ne pourrait comprendre dehors. Il avait pris son premier repas en tant qu'homme libre dans un pauvre restoroute qui avait au moins l'avantage de servir des hamburger-frites acceptables. Il avait baisé une serveuse dans les toilettes de la même manière qu'on va pisser un coup. Pas de discussion, pas de présentation. Juste un prénom badgé sur sa tenue, même pas sûr que ce soit vraiment le sien. Sans se préoccuper de ne pas lui faire mal, juste pour se soulager entre des cuisses, et les siennes lui convenaient parfaitement. Mais elle avait aimé, de toute façon, une fille qui se laisse prendre après juste un échange de regard, ça ne cherche sûrement pas de la douceur. Ensuite, il était revenu à Liberty, cette ville qui n'avait pas changé, éternellement la même, cette atmosphère, cette impression qui vous dit que vous êtes enfin rentré à la maison. Il avait ensuite revu certaines personnes, avant de finir au bar avec de vieux potes de chez les Red Devils. Retour en force de l'un des fils prodigues de la bande, le motard à pieds qui de toute façon avait trop bu pour rouler droit. Alors à trois heures du matin, il avait marché un peu sur la route, le parfum de l'alcool sur la langue qui s'entremêlait à celui de la nicotine qui le bouffait de l'intérieur sans qu'il trouve ça important. Il vivait. Il était libre.

Il tourna la clé dans la serrure de sa maison sans une hésitation. Elle ne payait pas de mine de l'extérieur, mais en vérité c'était ce qu'il avait toujours voulu, un truc différent de la bâtisse d'Orange Grove Boulevard qui avait été le théâtre sanglant de la fin d'un pan de sa vie. C'était son chez lui, là où les plus curieux auraient découverts quelques livres pour clamer qu'il était loin d'être illettré, qu'à une époque il aurait pu faire de grandes études. Sa maison, ses photos, ses affaires. Toute sa vie qui s'était arrêtée trois ans plus tôt. Il inspira l'odeur familière sans plus réellement l'être, comme si un truc avait changé. Lui ? Sans doute. Il referma derrière lui, condamnant l'issue, glissant les clés dans la poche arrière de son jean, avançant à l'aveuglette, sans prendre la peine d'allumer. Arrivé dans la chambre, il alluma la lumière, avant de retirer son blouson, d'arracher le tee-shirt qu'il passa par-dessus sa tête avant de le balancer dans un coin sans remord. Et c'est là qu'il la vit, la silhouette qui glissa au coin de son œil, se faufilant rapidement, mais pas assez. Les vieux réflexes. Ceux qu'il avait acquit en taule. Ressurgirent. Il pivota, sa poigne se refermant sur un bras, tandis que de l'autre il plaquait sa squatteuse contre le mur, le long de son avant-bras bandé pressé contre sa gorge. « Putain, mais t'es qui toi ? » fut tout ce qu'il trouva à dire face à ce petit bout de femme. « Et qu'est-ce que tu fous chez moi ? » insista-t-il, soupçonneux, ne la lâchant pas des yeux.

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MACFLY

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La gamine prit la parole, expliquant qu'elle squattait réellement les lieux. Pas qu'elle les volait, non, qu'elle y vivait parce qu'elle pensait qu'il ne reviendrait pas de si tôt. Comme si sa baraque était disponible pour que quelqu'un vienne y prendre ses aises. Elle n'avait pas l'air de mentir, et rien que les mots qu'elle balançait ne lui plaisait pas. Mais la prison avait laissé ses marques, d'autant plus que cela ne faisait que quelques heures qu'il s'en était extirpé. L'univers malsain où pour un crime similaire elle aurait été passée à tabac. Ou baisée sans état d'âme. Ou les deux. Fort heureusement, pour elle, ils étaient revenus dans la réalité, celle qui n'avait pas été celle de Clyde pendant trois putains d'années bien trop longues. Détournant les yeux de son invité surprise, il prit, pour la première fois, le temps de regarder la pièce plus attentivement, remarquant la preuve incontestable qu'elle n'était pas en train de le balader. Les draps froissés de son lit, et il était presque certain d'y découvrir son parfum. Et il n'avait même pas couché avec elle. C'était bien une première. Après tout, il n'avait jamais eu de petite sœur, personne à serrer chastement dans ses bras, personne à laisser dormir dans ses draps sans qu'il ne l'ait prise avant ou après. « Et t'as cru que ma baraque était open bar ? Que t'avais le droit de coucher dans mon lit ? » gronda-t-il en laissant son regard retomber sur elle. Il ne souriait pas. Il n'appréciait pas réellement de retrouver une petite squatteuse qui en plus allait se tirer sans rien dire, le laisser découvrir qu'elle l'avait joué Boucle d'Or et les Trois ours. « Les filles qui froissent mes draps écartent aussi les cuisses. » qu'il osa affirmer en approchant son visage du sien, menaçant, sans desserrer l'emprise de son être sur le sien.

Mais elle avait la chance qu'il ait déjà tiré son coup un peu plus tôt dans la journée. Qu'il n'avait pas l'alcool mauvais. Que c'était peut-être un Red, mais loin d'être le pire de la troupe. La mauvaise réputation que les motards se trainaient était pourtant justifiée, et Clyde aurait démoli n'importe quelle petite gueule sans remord, de la même manière qu'il avait baisé Babe alors qu'elle sortait avec son frère. Sans faire cesser la pression sur sa gorge, il mena son autre main à ses traits pour saisir brutalement le bas de son visage entre ses doigts. « Si tu cherches à te barrer, je t'attache. Si tu gueules... essaies pas de gueuler, tu risquerais de m'énerver. » la menaçait-il, visiblement déjà d'une sale humeur. S'il desserra finalement sa prise, ce fut pour la saisir par le bras et la propulser sur le lit. Si la suite aurait pu être prévisible, il n'avança pas vers elle, se contentant de rester là où il se trouvait. Soit, entre elle et la seule sortie empruntable. Les muscles bandés de son torse tatoué, toute son histoire dévoilée aux yeux de sa nuisible, puisqu'il ne portait plus rien au-dessus de la ceinture. « Raconte. Je déciderai ensuite ce que je fais de toi. » Des menaces qui brûlaient toujours ses mots, alors qu'il ne la perdait pas des yeux tandis qu'il s'appuyait contre la commode, prêt à réagir si elle décidait de lui jouer un mauvais tour.

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Clairement, elle l'emmerdait la gamine. Il était tard, c'était sa première journée de liberté et il se voyait mal la passer à se prendre la tête avec une emmerdeuse de première qui jouait les fortes têtes maintenant qu'elle n'était plus maintenue contre le mur, maintenant qu'elle était libre -plus ou moins- de ses mouvements. « T'as toujours été une emmerdeuse ou tu l'es devenu à force de pioncer dans le lit des autres ? » Il pinça les lèvres, avant de sortir son paquet de clopes de sa poche arrière, le zippo suivant le même chemin, pour qu'il allume enfin la tige intacte jusque-là. Seul bien de valeur qu'il avait conservé et qui lui venait de son père, un vieux truc gravé aux initiales de son arrière-grand-père et que les matons avaient intérêt à lui rendre à sa sortie de taule s'ils ne voulaient pas lui donner une bonne raison d'y retourner. Truc précieux. Dernier souvenir auquel il tenait vraiment. « Clairement, ton histoire j'en ai rien à foutre. Elle doit ressembler à celle de toutes les autres gamines... papa, maman t'ont foutu à la porte, ou alors tu t'es barrée parce que t'en pouvais plus. » Lui aussi, en fin de compte, il s'était barré. Parce que maman avait tué papa. Parce que vivre dans cette baraque, il pouvait plus. Parce que rester un gosse parfait, il en crevait à petit feu. Squatter ailleurs, comme pour s'imprégner d'une autre vie. Devenir quelqu'un d'autres. Suivre un autre chemin. Faire ses propres choix en se moquant de ce que les autres en diront. Elle lui rappelait ce qu'il avait pu être dans un sens, une grande première pour le tatoué. Peut-être même qu'elle lui faisait penser à Babe... à la version qu'elle aurait pu devenir. Peut-être.

Il la fixait, tirant une nouvelle taffe de la brindille qu'il fit rouler entre ses dents, avant de s'en saisir entre son pouce et son majeur pour l'écarter. Il détestait qu'on touche à ses affaires, mais d'un autre côté, si elle était venue crécher chez lui, un Red Devils... -et on viendrait pas lui faire croire que rien dans sa maison ne l'avait aiguillée sur le genre d'occupant qui y vivait à l'origine- ... c'était qu'elle n'avait pas forcément eu le choix. « Sauf que, je te donne une chance de t'expliquer. » Ce qu'il avait eu du mal et dû manigancer pour l'obtenir en taule. Cette même chance qu'il avait pu avoir quand il avait intégré les Red Devils. Et si elle était convaincante, peut-être même qu'il lui laisserait le canapé pour cette nuit. « C'est plus que ce qu'un autre Red t'aurait donné, crois-moi, pour payer ta petite escapade aux frais de la princesse. Et accessoirement récupérer les affaires qui t'appartenaient, mais qui sont à présent à moi tant qu'j'en aurai pas décidé autrement. » dit-il en ramassant un truc au sol sans vraiment regarder ce que ça pouvait être. Mais dans tout ce bric-à-brac, il devait bien y avoir quelque chose à quoi elle tenait.

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MACFLY

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« Heureusement qu'on n'a pas baisé ensemble alors. » répliqua-t-il. Fatalement, si elle était déjà chiante avant, après cela ne pouvait qu'être pire, non ? De toute façon, ce n'était pas le sujet le plus important, tandis qu'il avait balancé ça comme une vulgaire banalité. Non, ce qui suinta de ses lèvres fut le désintérêt pour son histoire, celle trop banale qui courrait les rues, qui ne pouvait que lui rappeler la sienne, ou bien encore celle de Babe. Il ne savait pas ce qu'elle était devenue, si elle avait trouvé un travail, un petit copain, quelque chose, et il n'y avait pas vraiment pensé en trois ans. Il avait d'autres choses à faire, d'autres choses qui lui trituraient la cervelle. Du sang à faire disparaître de ses jointures dans le lavabo. Il n'avait jamais tué personne, cela ne s'était pas produit là-bas non plus, mais il était moins net qu'autrefois, l'opportuniste bagarreur qui laissait s'évader sa violence avec un plaisir malsain. La gamine lui rappelait le gosse en fuite qu'il avait pu être. La fille qu'il avait fait jeter de chez ses parents. Le même genre de sales histoires d'un millier de gamins à travers tout le pays.

Et elle finit par ouvrir les lèvres, arrêter de jouer les fortes têtes pour lui dévoiler la vérité. « j'ai pas d'endroit où vivre, j'suis tombée sur ta maison par hasard. et y a cette vieille qui vit pas loin, elle m'a dit comme quoi t'étais en prison pour trois ans, sauf que je savais pas qu'elle était sénile. »Comment il savait qu'elle ne mentait pas ? Parce que la vieille en question, il voyait très bien qui c'était. Elle avait une vision des choses un peu particulière, et la mémoire parfois défaillante. Une voisine qui vivait un peu plus loin, qui était même venu lui apporter un pain de viande quand il avait acheté la baraque. Merde, imaginez donc la tête de Clyde devant la vieille qui lui souriait comme s'il n'était pas tatoué, avec une moto, et... torse nu. L'objet en main qu'il soupesait sans même vraiment s'y intéresser, il laissa un rire moqueur s'esquiver de ses lèvres. Elle avait écouté la vieille Mona.

« Et t'as pas de potes pour t'héberger ? » demanda-t-il en dardant son regard sur celle qui se trouvait sur son lit. Mais la réponse coulait de source : non. Sinon elle ne serait pas là. Sinon elle n'aurait pas pris le risque de squatter la maison d'un Red Devils. « Tu peux rester cette nuit si tu veux. Prends le canapé, partages le lit, j'm'en fous, mais me fais pas chier. Et t'avises pas d'me piquer un truc. » dit-il en la menaçant de la main qui tenait sa clope, parce qu'il était sérieux, et que si elle s'avisait de lui prendre quelque chose, il la retrouverait et lui ferait passer l'envie d'avoir même eu l'idée d'y penser. La seconde d'après, il se détachait de la commode, alors qu'en de brèves enjambés il avait déjà rejoint son lit... et accessoirement la fille. Il s'y installa avec nonchalance, se laissant pourtant pratiquement tomber dessus, allongé. « Putain... » soupira-t-il en plaçant la main armée de la clope sur son front. Un vrai lit. Un vrai matelas. Fermant les yeux pour savourer, il guida ses doigts à ses lèvres pour tirer une autre taffe, tandis qu'il se débarrassait de ses godasses sans faire plus d'effort que de les pousser de ses pieds. Puis il lui tendit l'objet qu'il avait toujours dans l'autre main, la regardant en biais. « Alors Boucles Vertes, tu vas te tirer ou tu vas rester ? » Après tout, ce n'était pas comme si elle n'avait pas déjà dormi dans son lit en mode Boucle d'Or.

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MACFLY