[a lot on my mind](1). Miecsyslaw. Un choix d'ma mère. De c'qui ma servait de matka. Elle voulait c'prénom à tout prix. Pourquoi ? J'sais pas. Sa signification ? J'sais plus. Ou peut-être que je ne l'ai jamais su. Mon père, l'ojca. Il a rien choisit. Rien du tout. Il s'est contenté d’acquiescer et d'fermer sa bouche.
(2). J'ai vécu dans une famille à l'apparence si aimante. A l'apparence. Tenu d'une main d'fer. D'une main cruelle. Et pourtant pas celle qu'on pensait. La matka. C'était elle. Une femme petite. La mine maladive. Les joues creuses, l'air fragile. Alors qu'à côté, son mari était imposant. D'allure ferme. Mais jovial. Pourtant ce grand gaillard était effrayé par sa femme. Cette petite créature semée l'horreur dans la petite bâtisse. Elle m'faisait peur. Elle usait d'la force. Ce fut pire quand mon p'tit-frère et ma p'tite sœur sont nés. Deux enfants d'un coup. Elle n'a pas aimée. J'ressemble à mon père. Bien trop. Coups sur coups. Engueulade sur engueulade. Nous étions éduqués à la baguette. A la ceinture. Au enfermement dans l'placard. Puis est enfin venu la délivrance. Quatrième enfant.
« Elle ne le touchera pas. » L'ojca qui prend ses gamins, les emmène à la station d'police. Délivrance. Douce délivrance. Enfermée à son tour. J'suis plus jamais allé la voir. Ça fait vingt-trois ans. Elle est sortie, mais j'sais pas où elle est allée.
(3). J'garde des traces. Elles sont inscrites sur ma peau. Dans mes souvenirs. Sur mes yeux. C'est terrible. Ça a disparue avec le temps. Mais mon boulot. Certain cas. Ça r'vient. Ça frappe doucement. Ça r'monte. Ça fait mal. C'est horrible. Mon dos porte ses signatures. Ses coups. Le bruit tranchants de sa ceinture contre ma peau. Le goût du sang. Sa couleur. Son odeur. Les pleurs. Les larmes coulent dans un silence. Silence rythmé par les coups. Elle n'a jamais hurlé. J'm'en souviens pas. Non. Elle se levait. Tendait sa main vers son mari. Tout le monde comprenait. Tout le monde savait. Mais personne ne disait rien. J'me levais. Les plus p'tits trop effrayé ou trop jeune. J'm'alignais face au plancher. Main tremblante. J'retirais ma chemise. Elle tenait quand même au vêtement. Et le premier coup a claqué. La peur au ventre. J'ai survécu. Les p'tits, ils recevaient moins. Parce que j'étais là. Tout près. Ils étaient innocents. J'leur en veux pas.
(4). Mon père. C'est mon sauveur. Ok. Il a mis du temps à ouvrir les yeux. Mais j'lui en veux pas. Lui non plus. Il est génial. Après, ça, après, cette épisode, il a toujours été là. Il a voulu s'rattraper. J'le sais. C'était voyant. Mais j'voulais d'l'amour. J'l'avoue. Alors je l'ai laisser faire. S'rattraper de tout ce temps perdu. J'le vénère presque. J'le vénérais. Il y a un temps où les enfants grandissent. Oublie. Vole de leurs propres ailes. Gustaw. La p'tite sœur. C'est mon p'tit ange. Osez poser vos yeux dessus ou juste la touchez. Une, deux, trois. Me voilà. Respiration haletante. Les poings meurtries. J'frappe. Ok. J'avoue. J'la protège trop. Un peu trop. Elle veut d'la liberté, Emilia - la seule qui a d'ailleurs héritée, d'un prénom potable -, mais elle veut être protégée. Choix compliqué. P'être qu'on en fait trop. Moi et Sully. On la couvre trop. En parlant Sully, d'son nom complet : Sulislaw. C'est l'gamin qui a survécu. Qui vous nargue. Un sourire au visage. Pourtant, il est aussi brisé qu'nous. Mais il garde la tête froide. Il dit "tout va bien, t'en fais pas". J'y crois pas. C'est un amour c'gosse. Remplie d'colère, j'essaye de l'apaiser. Il est paumé, mais sur la bonne voie. Il est doué. Et y a l'dernier. Lucjan. Il était prêt à vivre. Il a rien subit. Une chance. Il a vécu dans la paix, l'amour. C'était un bon gamin. Un bon gosse. Mais. Il est parti. J'm'en veux.
(5). Il voulait faire comme l'grand-frère. Flic. Il voulait sauver des vies. Mais la sienne fut pris. A peine rentré à l'académie. Formé sur l'terrain. On met les nouveaux en actions. Il faut les forger. Ils l'ont enterré. Mort. Doucement. Quelques heures sombres avant la déchéance. Il est jeune. Vingt ans. Vingt pauvres années. Le v'là enterré. Il méritait pas ça. Il devait vivre. Avoir une bonne vie. Il voulait des gamins. Une femme. Une belle maison. Un travail. Pas la mort. Pas c'te caisse. Enfermé à jamais. Le v'là prisonnier. Y aurait pa du avoir d'problème. C'était un simple délit. Rien de dangereux. Un simple petit braquage. Un peu d'argent volé. Rien d'méchant. Un seul foutu coup d'feux. Un tout p'tit coup. Il est parti. Personne n'a rien compris. J'ai rien compris. Rien vu. J'm'en veux. J'vais souvent sur sa tombe. Tout seul. Après un cas difficile. J'parle dans l'vide. J'bois avec la lune. Avec les morts. J'trinque à leur santé.
(6). J'bois pas mal, j'avoue. J'assume pas trop. J'ai un peu honte quand même. Les bouteilles. Elles s'entassent toutes. Elles s'brisent parfois. Un peu comme moi. Elles se fissurent doucement. J'les vide. Une par une. Le liquide coule dans ma gorge. Elle m'brûle. C'pas grave. J'bois jusqu'à perdre la raison. Jusqu'à c'que les bruits cessent. Que les souvenirs s'évaporent. Que tout part. J'm'endors à même le sol. J'fais pitié. Gueules de bois. Mal de crâne. C'est c'qui fait ma journée.
(7). Regard perdu. Flottant sur les différents visages. J'accroche pas. J'fixe pas. J'passe juste. Les doigts qui tapotent lentement, frénétiquement. Le son angoissant de l'horloge. Tic. Tac. Et v'là qu'ça recommence. Encore et encore. Le même son. Répétitif.
« Mr. Bielski ? » J'relève la tête. Voix féminine. Belle femme. Un sourire chaleureux au coin des lèvres. C'est elle la psy ? J'pensais qu'elle s'rait vieille. Toute fripée. Un costard sur les épaules. Un ton sombre dans la voix. Rien à voir. J'me lève. Doucement. Faut pas presser papy. C'est l'grand chef qui veut qu'la voit. Moi pas. J'aime pas trop parler. Surtout d'moi. Alors ça fait pas trop d'chose pour parler. Les cernes sur mon visage démontre très bien, mes nuits d'angoisses. J'rentre dans l'bureau. L'attend. J'trouve son bureau aussi chaleureux qu'son sourire. Quoi qu'un peu lugubre le tableau avec les chameaux.
« Vous pouvez vous asseoir. » Elle est r'venue. J'm'assois. Ça va être long.
J'crois qu'j'l'aime bien. Au fils des jours. Des rendez-vous. J'me livre pas autant qu'elle le voudrait. Mais tant pis. J'ai appris, qu'elle viendrait avec nous. Qu'elle serait sur l'terrain. A nos côté. Dans notre quotidien. Plus d'rendez-vous. Elle s'occupera d'nous sur place. Elle nous aidera pour les profils des suspect. J'sens qu'ça va être sympa.
(. J'vis un peu reclus. Mon quotidien, c'est d'venue : Boulot, famille, boire. L'boulot, c'est qui m'fait sortir un peu. Rencontrer des gens. Aider. Vivre. La famille. C'est un peu l'principal. Et boire. C'est rentré dans mon quotidien tout seul. J'désespérais et la bouteille était là. Elle m'attendait. Me supplier. J'ai bu. Encore. Encore. Chaque goutte. Chaque fond. J'buvais.
(9). Les viols. Les violences. Les coupables. Les victimes. Tous s'entassent dans ma tête. Tous s'mélangent. Tout m'détruit. J'étais p'être pas assez fort. J'suis pas assez fort. J'suis fragile. J'fais juste semblant. Dans l'métier, faut faire semblant. Faut rester fort. Sans quoi, il est facile de vous détruire. Dès qu'on braque son flingue sur moi. J'tremble, mais j'prend sur moi. J'ai peur, mais j'dis rien.
(10). UCEY - non corrigé -
(11). UCEY
(12). UCEY
(13). UCEY
(14). UCEY
(15). UCEY