toxic (yael niam)

tu as douze ans
et papa qui te vend au plus offrant
et toi qui ne comprends pas

flash flash dans tes yeux humides ; lumière s a c c a d é e

tu poses sur le velours pourpre
alors que tes joues s’empourprent

il est loin le temps des jours heureux

ta peau roule roule sous ses doigts longs. cambrée à l'extrême, tu te fais cygne sur ses cuisses. tu gémis, tu palpites, tu respires l'air moite et rêche. tes mains sont crispées sur ses seins. elle ne dit rien, elle ne dit jamais rien. alors tu continues. sur la musique on va on vient. tes ongles s'enfoncent dans la chair tendre. tu sais ; tu sais qu'il y aura tes marques sur sa peau demain, tels des croissants de lune violines. pourtant tu peux pas arrêter ça. tu lui fais mal comme elle te fait mal, comme tu te fais du mal. hardy la peureuse, rosamund l'idiote. tes coups de reins se font coups de hâche. tu t'agrippes à ses longs cheveux humides. ils sont la corde autour de ton cou, ils sont ton agonissant suicide. tu les respires, nauséeuse. les cendres emplissent ta gorge chaude. puis un voile blanc immaculé s'abat dans la pièce précédé d'un gémissement ultime. tu t'effondres comme une poupée de chiffon sur son corps. rosamund la jolie poupée. " putain, t'es douée " mais ce n'est pas sa voix. ce n'est pas elle.
tu vas peut-être aller en enfer pour cet adultère.
mais t'as compris depuis longtemps ;
t'as compris depuis longtemps que l'enfer c'est être toi, ici

ici il y a les autres
ici tu ne peux pas accédé au bonheur
parce qu'ici le bonheur est un leurre

le bonheur est destructible et toi, c'est bien connu, tu détruis tout.

tu es le chaos

tu as détruit ta mère, tu as détruit tes enfants et
tu l'as détruite elle
et puis il y a toi, tu es ta plus grande destruction.

j'irais tuer mon père, non je ne suis pas un ange il a tout saccagé en dedans de toi. et ta mère n'était déjà plus là. alors tu as posé pour lui, ce photographe maudit. lo-lii-ta : le bout de la langue fait trois petits pas le long du palais pour taper, à trois reprises, contre les dents. lo. lii. ta et tu vomis cette lolita à papa. t'es fêlée rosamund. mais tu peux pas, tu peux plus. alors tu t'enfermes pour déverser tes mots sur le papier froissé. et le bourbon qui coule à flot et ta main qui tremble.
et toi, qui détruis tout tout tout.