[a lot on my mind]

He says, "Oh, baby girl, you know we're gonna be legends
I'm a king and you're a queen and we will stumble through heaven
If there's a light at the end, it's just the sun in your eyes
I know you wanna go to heaven, but you're human tonight"

Delilah, la fleur fanée au jardin secret où le vert étincelant de l'herbe fraîche a laissé place aux fleurs sauvages et mauvaises herbes.

cellules grises abîmées, fatiguées.
traces de larmes sur ses joues rosés,
elle arbore un sourire mythique, énigmatique
et pourtant ses yeux mouillés brillent de mille feux.

son rire résonne dans la prison des sœurs gale et son cœur se meurtri en silence. secrètement elle verse des perles salées lorsque Morphée vole l'âme de ses sœurs. elle redoute la nuit où un silence inquiétant règne, où ses paupières se font lourdes.
elle redoute ces rêves cauchemardesques qui l'empêche de vivre, de respirer.
alors elle se consume dans des médicaments achetés à la pharmacie du coin après son service du soir au bistrot d'à côté.
elle laisse son âme errer entre le cosmos et la réalité, son corps flotter dans l'immensité de cet antre rien qu'à elle, elles.

yeux de biches, peau argentée aux reflets dorées, le café qui dégouline de la cafetière, le thé à la menthe trop chaud avec une cuillère de miel, cheveux charbons et lèvres en cœur rouge passion. on peut lire dans ses yeux une profonde mélancolie, une douce dépression qui éclate dans ses oreilles comme un violent bombardement. la soif de vivre et l'envie de mourir, la fille désorientée aux sentiments brouillés, mal dosés. les bonbons à la violette et les couleurs pastels cramoisis.

la journée elle caresse le soleil et contemple les nuages de ses grands yeux curieux et le soir elle caresse les étoiles et brise ses mains de porcelaines. cœur qui tremble comme un séisme au contact humain, au doux toucher de sa peau satinée. douceur incertaine, colère aveuglante, migraine incessante perdue entre ses origines et ses désirs enfouies.

l'objet interdit entre les doigts, elle laisse la fumée enflammer ses poumons et polluer l'air impur du soir et puis elle rentre comme-si de rien était, et les regrets l'envahissent aussi rapidement qu'un tsunami qui détruit tout sur son passage, sans loi ni foi, mère et enfants.

c'est loin le jardin d'enfance, le ciel bleu et le chant des oiseaux maintenant elle ne connait plus que le crépuscule et le croassement du corbeau nocturne. les mensonges fleurissent autour de la déesse delilah et de ses traits divins elle envoûte les hommes à la simplicité destructrice.   



sur les lits parfaitement fait, les draps immaculés et les cousins émanant l'odeur de la lavande se dessine des silhouettes de nymphes qui dansent sur un fond de blues. mélodie emprunté au vendeur de vinyles, mélodie écoutée en secret quand les figures autoritaires ont finalement fermés leurs yeux apeurés et féroces.
la nuit leur offre ses merveilles et de ses grands bras enveloppe ses sirènes, ses pécheresses refoulées qui prie dieu et danse avec le diable.
pour faire sourire elle joue le jeu et quand l'avant-dernière entre dans sa transe et se met à chanter des dialectes inconnus, elle tire une carte et au fond espère un avenir plus coloré.
d'ailleurs elle colore les murs délabrés de la ville, de bleu, de violet, de rouge, dans ses rêves et la chambre est recouverte de ses œuvres, des fresques aux formes abstraites jugées non-tentatrice par le paternel qui n'a pu que se résoudre à accepter ces couleurs en voyant l'éclat dans les yeux de ses filles.

Delilah est la seule que le père écoute un peu, c'est la figure maternelle de remplacement, en réalité il la voit déjà mariée, il l'imagine vêtu de satin blanc sauf qu'elle, elle rêve d'amours passionnels, d'aventures les cheveux dans le vent. elle ne veut pas de cet amour saint avec le fils aîné des Sterling, famille aussi pieuse que les Gale.   


“ La fille est dépressive et préfère parler de Freud avec le psychologue alors son père l'a envoyé se confesser. Elle a fini par payer le confesseur pour qu'il confirme sa présence pendant ce temps elle va écumer les bars et les cafés de la ville, je l'ai vu hier soir, elle est pas mal dans son genre dommage que sa famille soit aussi bizarre. ”

Des témoignages comme celui-ci sur les sœurs Gale y'en a plein, ça court les rues, on chuchote aux creux des oreilles dans leur passage. Elles possèdent cette aura mystique et des traits à la fois attrayants et effrayants.


Delilah c'est l'imagination débordante, les pensées secrètes, le thé avant le café, les vieux films romantiques regardés chez la voisine Marguerite et les passions charnelles, ce plaisir malsain en regardant cette violence heureuse lors des matchs de hockeys pendant qu'elle verse du café dans une tasse assoiffée, c'est les regards échangés avec le beau livreur de journaux, c'est la peinture sur les mains et la fraîcheur d'une brise d'été et le soleil couchant un soir d'automne, l'ombre dans la lumière, l'extase et la souffrance, le manque d'air, les vieux livres, les carnets abîmés et les photographies gardées, un sourire faux qui se veut vrai, des traces de larmes sur les joues, c'est l'attrape-cœur, celle qui se cherche sans cesse, les questions sans réponses et cette plaie dans le cœur.  
 

“ Delilah ne mange plus, elle ne sourit plus non plus ”. homme inquiet, aux milles soucis, sourcils froncés et lèvres gercées. “ Laissez-lui un peu de temps, elle vient de perdre sa sœur. ” la perte d'un proche est une douleur incessante c'est comme avoir un trou dans la poitrine et votre cœur écrasé entre une paume féroce.

“ Je sais bien mon Père mais ses sœurs doivent prendre exemple sur elle, pas avoir pitié d'elle  ”.

on raconte que les sœurs Gale était cinq autrefois, cette histoire ressemble étrangement à un mythe pourtant elle est bien réelle.

“ J'essaierai à la prochaine messe de purger leurs pensées et de guérir leurs âmes ”.

Anne, Delilah, Eve, Damaris et Sarai. La première s'est éteinte et les autres sont en veilles.


delilah les yeux mouillés caresse les photos abîmées, anne encore anne et son sourire colgate et ses yeux brillants comme une étoile dans le ciel noir.

cri étouffé, main frustrée se promenant dans cette cascade ténébreuse, lèvre inférieure attaquée et des larmes sur ses jambes découvertes.

anne était parfaite mais anne n'est plus.

- il faut tourner la page ? n'est-ce-pas ? mais comment veux-tu que j'oublie  ton rire cristallin, ton joli minois et les fleurs dans tes cheveux d’ébène qui ravivait ton visage de poupée. j'arrive à peine à griffonner ces mots sur un bout de papier mais j'aimerais tant graver ton visage sur mon cœur enchaîné...    

des gouttes d'eau sur la feuille et de sa main tremblante elle fait tomber la plume sur le sol. la fleur fait une crise à nouveau, elle hurle jusqu'à s'en déchirer les poumons, jusqu'en avoir le coupe soufflé et son visage pâlit et un sourire apeuré apparaît sur ses lèvres rosées.