encore une nuit à l'insomnia, entre le bar et tous ces gens bourrés après un verre. naevia ne se plaint pas de son nouveau travail, en apprécie même certains avantages mais elle est consciente que ce n'est pas le meilleur qu'elle aurait pu trouver. sauf que la vérité est que personne ne veut d'une traînée entre ses quatre murs et à l'insomnia, ils l'ont accepté sans poser de questions inutiles. alors elle subit les mauvais côtés de son boulot sans broncher. elle n'a aucun autre choix si elle veut avoir un toit et manger à sa faim. naevia, elle sourit aux imbéciles qui tentent de lui toucher les seins, à ceux qui lui font des demandes indécentes, et elle se répète qu'elle n'a aucun autre choix. soit elle sourit, soit c'est la porte.
ce soir, tout se passe bien. il n'y a pas encore eu de débordements et les clients sont polis. lorsqu'il n'y a plus personne au comptoir, elle s'autorise une petite danse avec sa collègue puis elle reprend ses fonctions. là, au milieu des jeunes alcoolisés et des adultes défoncés, il y a une figure d'élégance qui passe la porte de la boîte de nuit et s'assoit sur une chaise au bar. naevia ne la voit pas tout de suite mais lorsque ses yeux se posent sur son visage, elle est frappée par sa beauté. ses cheveux et iris couleur chocolat font ressortir la pâleur de ses traits. elle ressemble à une nymphe, à une déesse antique. naevia se rapproche d'elle. un royal mojito, s'il vous plait, demande-t-elle avec un foutu sourire qui retourne le crâne de la raalon et fout le feu à ses entrailles. elle y répond sans grand mal. c'est comme si c'était fait, ma belle. elle ne perd pas de temps avant de sortir les ingrédients et de se mettre à la tâche, évitant de regarder l'inconnue de peur de faire une connerie. lorsqu'elle a terminé, elle sert le mélange dans un verre qu'elle lui tend. vous m'en direz des nouvelles, qu'elle affirme en se mordant la lèvre inférieure.

naevia, elle dévore sa cliente du regard. elle est comme hypnotisée par sa beauté à en faire pâlir les dieux et tomber les anges du ciel. elle n'arrive pas à détourner les yeux et n'en a pas envie. c'est délicieux, c'est le meilleur mojito que j'ai pu goûter. naevia sourit, sentant ses joues brûler. ce compliment lui fait du bien. c'est le seul qu'elle a reçu de la soirée et probablement le dernier. vous êtes en ville depuis longtemps ? une dizaine d'années. j'avais à peine dix-huit ans quand je suis arrivée ici, qu'elle répond. elle ne s'attarde pas sur les raisons de son arrivée à liberty. et vous ? elle demande, intriguée. elle n'a jamais vu la demoiselle, s'interroge sur la possibilité qu'elle vienne d'arriver en ville. je serais étonnée de savoir que vous êtes à liberty depuis un certain temps. je n'aurais pas pu passer à côté d'une si jolie femme et en oublier son visage, qu'elle ajoute avec un sourire sur les lèvres.

naevia, lorsqu'elle est attirée par une autre personne, elle ne le cache pas. elle avoue sans demi-mots, sans cacher ce qu'elle ressent derrière des fausses apparences. et là, elle remarque les regards de l'inconnue et l'électricité dans l'air. naevia n'a pas besoin de l'entendre de la bouche de cette dernière pour savoir que cette attraction est réciproque. j'y suis revenue récemment et j'ai étrangement envie d'y rester. la barmaid laisse un petit rire s'échapper de ses lèvres. elle discerne ce qui se cache derrière ses mots, entre les lignes. c'est l'insomnia, il fait un certain effet, qu'elle taquine gentiment. vous vous appelez comment ? les lippes de naevia s'ouvrent mais avant qu'elle n'ait pu dire quoique ce soit, un client arrive au comptoir. excusez-moi, je reviens tout de suite. elle se précipite vers l'homme, le serre et retourne à son interlocutrice. naevia. je m'appelle naevia, qu'elle dit à peine de retour devant elle. et vous ? elle se penche, pose ses coudes sur le comptoir.

sadie, que la nymphe répond. sadie, c'est beau. sadie, ça lui ressemble. les coudes sur le comptoir, elle l'observe, la détaille à travers les spots de lumière. elle garde ce sourire étincelant sur son visage. il paraît qu'il est beau à en crever, qu'on a juste à le voir pour tomber sous son charme et c'est un peu ce qu'elle veut. au début mon père souhaitait m'appeler bullet, mais ma mère a réussi à l'en dissuader. je l'en remercie encore aujourd'hui. le rire de sadie résonne dans les oreilles de naevia. il est aussi charmant qu'elle. elle ne peut s'empêcher de se mettre à rire à son tour. ça s'entrechoque dans les airs. bullet... elle passe sa langue sur ses lèvres. c'est atypique mais ça en reste beau. vous êtes une si jolie femme que vous pourriez porter tous les prénoms du monde, vous les rendriez charmants. nouveau sourire. elle pose sa main sur le comptoir, près de celles de sadie. elle regarde l'horloge derrière elle. je termine mon service dans une quinzaine de minutes et, hm, si vous acceptez de m'attendre, on peut se trouver un endroit tranquille pour discuter ? puis pour s'embras(s)er.

c'est avec le cœur battant qu'elle termine son service et se précipite vers la sortie en attrapant le bras de la nymphe. elle ne sait pas quoi s'attendre de cet échange sous les étoiles. elle ne sait pas ce qu'elle peut espérer. peut-être des lèvres qui se rencontrent. peut-être des doigts qui s'entremêlent, traversent les vêtements pour toucher la peau en dessous. peut-être que ça ira plus loin que des mots. plus loin que des baisers. dans tous les cas, elle est heureuse de partager ce moment avec la dite sadie. elles se fraient un chemin entre les corps transpirants, se collant les uns aux autres, et sortent. l'air frais s'abat sur le visage de naevia et elle le respire avec un sourire aux lèvres. elle préfère cet air à celui de la boîte de nuit. il est pure - bien que pollué - et il lui fait du bien. ses yeux se reposent sur la demoiselle à ses côtés. elle sourit davantage, illumine son visage de son rictus magique. où voulez-vous aller ? qu'elle demande. naevia, elle pourrait l'emmener n'importe où. faire n'importe quoi.