[a lot on my mind]un (❉) elle ne se souvient plus de ses parents. elle s'souvient plus de leur visage, du timbre de leur voix, de leurs expressions favorites, de ce qu'ils préparaient au dîner, de s'ils disaient je t'aime et s'ils la prenaient dans leurs bras. peut-être qu'il vaut mieux comme ça, peut-être que c'est plus facile de tourner la page.
dos (❉) son frère, son pilier, sa béquille. le seul présent depuis toujours, le seul qui soit encore en vie, qui ne soit pas encore fou. parfois cam elle se rend responsable de son passé, de l'accident tragique de sa mère, de la folie de son père. elle se dit que de toute façon, ce ne serait pas étonnant qu'elle y ait sa part de responsabilité puisqu'elle foire toujours tout. alors elle lui cache une partie de sa vie, ne lui affiche que la surface plutôt clean.
tres (❉) cam elle traîne toujours là où il ne faut pas, là où les filles ne devraient pas aller seules. mais cam elle sait se défendre, cam elle sait où frapper, quand frapper, comment frapper. tout ça cam elle l'apprend depuis qu'elle a onze ans. parce que cam elle veut s'imposer, avoir l'impression d'être quelqu'un.
cuatro (❉) paroles trop franches, trop froides, cassantes. cam elle dit tout ce qu'elle a sur le coeur, cam n'a pas de filtre. ce sont des mots-couteaux parfois qui sortent de sa bouche, cam elle n'est pas dans la demie-mesure, la gamine elle a tendance à s'emporter quand on a réussi à l'atteindre derrière sa carapace. puis elle regrette en silence. et s'dit à nouveau qu'elle a tout foiré.
cinco (❉) cam elle est pas en phase avec la société, cam elle est désespérée. elle se reconnaît pas dans le portrait des jeunes femmes de vingt-deux ans du vingt-et-unième siècle. elle s'reconnaît pas dans les personnages de séries américaines. elle cherche pas à consommer cam, il ne lui faut pas grand chose à la môme. elle s'en fout du bien matériel, au fond tous ses jobs qu'elle accumule, c'est pas pour l'argent. l'un sert à paraître clean aux yeux du frère, les autres à canaliser cette flamme constante qui brûle en elle.
seis (❉) cam elle s'est cassée peut-être presque tous les os du corps, mais la partie qui lui a fait le plus mal c'est le cœur. elle a aimé très grand, elle a aimé très fort camí. et l'armure n'était pas entière, il a réussi à atteindre sa mécanique et il l'a complètement déréglée. alors camí a remis les engrenages en place, elle a refermé le tout avec de la colle forte et du sparadrap. armure presque invincible, cam a trop peur de souffrir encore.
siete (❉) cam elle préfère mille fois les gifles et les paroles crues à l'ignorance, à l'indifférence. cam elle déteste avoir ce sentiment de n'être rien, cette impression de n'être qu'une parmi tant d'autres, de n'avoir aucun impact sur la vie des gens. on lui a trop souvent tourné le dos, on l'a trop souvent reniée camí, et derrière ses fières allures elle en reste profondément blessée. alors camí s'enfonce dans la connerie, elle en oublie ceux qui restent.
ocho (❉) camí aimerait être la fille cool, celle que décrit gillian flynn. camí ne voudrait être que ça, cette fille qui ne se prend pas la tête, qui boit des bières pas chères, qui bouffe ce qu'elle veut et qui garde une taille parfaite, cette fille qui accepte tout, qui écarte les cuisses sur demande, celle qui n'est pas une salope non, juste une fille cool. mais camí est plus complexe que ça, et camí et la soumission ça ne colle pas.
nueve (❉) il y avait ce gars, ce gars avec ses cheveux bouclés, avec ses yeux clairs, son sourire-soleil. il y avait ce gars avec qui ça avait collé, ce gars duquel elle ne pouvait plus se détacher. il lui a demandé au lycée, au début de leur relation, dans quelle catégorie elle se plaçait dans solitaire, populaire, en recherche de notoriété, différente. cam elle a froncé les sourcils, elle s'est repassées ses seize ans de vie en tête avant de dire différente. camí c'était évident qu'elle faisait partie de cette secte privée de populaires, ceux qu'on admire, ceux qu'on envie, ceux qu'on connaît tous. camí elle en avait rien à foutre de cette notoriété, camí ça la faisait même chier parfois, mais c'était comme ça. cam on la connaissait parce qu'elle ne baissait pas sa culotte non, cam répond, cam cogne, cam s'en branle et amuse la galerie. mais cam était seule la plupart du temps, cam errait dans les couloirs, cam errait dans les rues. et cam n'avait pas peur d'ouvrir la gueule, et de défoncer celles qui ne lui plaisaient pas. camí avait répondu différente, et il l'était aussi. il y avait ce gars avec qui ça avait collé, ce gars qui ne voulait pas la voir au bahut, ce gars qui l'ignorait.
diez (❉) cam elle ne croit en rien. pas de dieu, pas de forces surhumaines, rien. pas même à la vie après la mort, pas même en l'existence de l'âme. camí elle se dit juste qu'une vie ça ne vaut pas grand chose, qu'on est infimes, qu'on n'est rien, moins qu'une poussière dans l'univers. cam elle se dit que quand le corps cesse de vivre, quand la mort l'a envahie, tout meurt. et le corps se décompose, et il fera vivre d'autres êtres vivant. et que ce qu'on aura transmis de notre vivant se transmettra encore après notre mort, et que c'est ça l'âme.
once (❉) cam elle fume depuis ses treize ans, cam elle n'sait plus s'en passer. elle fume pas énormément, mais il lui faut sa clope au lever, sa clope au midi, sa clope pour se coucher. camí elle a toujours considéré la clope comme un refuge, un moyen de s'éclipser, de s'échapper. cam elle aime bien fumer sa cigarette seule, cam elle fume pas pour accompagner les autres. puis cam fume le joint aussi, depuis qu'elle fume la cigarette. pas à outrance non plus, mais il lui faut au moins son petit joint dans la semaine ou elle ne tient pas.
doce (❉) elle dessine, camí. des visages, des figures. camí capture des instants heureux sur des bouts de papiers, depuis qu'elle est gosse. camí elle se pose dans un bar, puis elle dessine les gens autour d'elle, elle analyse, elle observe. elle essaie de mettre une histoire derrière un regard, une émotion derrière un geste. mais ces dessins camí elle les garde pour elle, pour elle seule.
trece (❉) camí elle a embrassé une fille un soir. beaucoup d'alcool, un peu trop de drogue. camí elle se souvient de l'avoir embrassé puis plus rien. elle s'est réveillée à ses côtés, elle a préféré ne rien s'imaginer. alors camí parfois elle se pose des questions, elle détaille les courbes féminines, elle s'interroge lorsqu'elle trouve une fille jolie. après tout elle s'en fout, elle veut pas se mettre d'étiquette, mais quand même camí elle aime beaucoup trop les garçons. elle sait pas, elle sait plus.
catorce (❉) armin. un nom qui dessine un joli sourire sur ses lèvres, un nom qui fait battre son coeur. armin, elle a l'impression de le connaître depuis toujours. elle n'avait qu'onze ans, les rues étaient trop sales, trop cruelles pour elle. armin il l'a aidée, armin il l'a rendue plus forte encore. comme marian, armin est un pilier. un élément fondateur de son bien être, une béquille, un rouage qui maintient la mécanique en place.
quince (❉) camí elle papillonne dans tous les lits de liberty, mais camí ne reste jamais, camí ne revient jamais, et ne laisse aucune trace d'elle. camí aime pour une nuit et s'envole au petit matin. cam elle aime jouer, cam elle aime les tenir entre ses doigts, les prendre au piège, mais cam ça ne l'amuse pas de briser des cœurs alors elle part avant l'explosion, avant une quelconque intrusion dans le sien, de cœur.
dieciseis (❉) elle le voyait comme un sale mioche, un mec qui a tout pour lui, qui obtient ce qu'il veut. c'était rien que le petit ami d'une pote, rien qu'un emmerdeur qui jouait avec le feu, avec sa flamme, à camí. il y a de la douceur parfois dans ses yeux qui se posent sur elle, il y a de l'envie quand elle plante son regard dans le sien. ils se chamaillent, se repoussent, se fuient comme des enfants pour ne pas admettre l'évidence.
[story of my life]
Elle est Gauloise au p’tit vin blanc
Elle est contre gouvernements
Elle est pas fille des religions
Elle est pas putain du pognon
Elle est vent du Nord ou d’Ouest
Elle est vent du Sud ou de l’Est
Elle est sans-abri à la rue
Elle est toujours peine perdue
Elle est gitane elle est profane
Elle est quand la gauloise plane
Elle toujours fumeuse de joints
Elle dort dans les gares en chemin
Elle est solidaire au combat
Elle est Varsovie Messina
Elle est pas banquière pour un sou
Elle est pas bottes au garde à vous
Elle est sans-abri sans frontière
Elle est contre totalitaire
Elle est j’t’emmerde avec ta thune
Allez vas-y ressers une brune
Elle est accordéon sanglot
Elle est accorde-moi un tango
Elle est destin des origines
Elle est racine gréco-latine
Elle est contre l’union bancaire
Elle est mes révolutionnaires
Elle aime les bars elle aime la bière
Elle aime l’odeur du populaire
Elle est moitié louve moitié chienne
Elle est d’où qu’on aille d’où qu’on vienne.......
Damien Saez, Mon Européenne